Miliana, le paradis merveilleux de mon enfance/ Par Mireille CHICHA

MilianaAprès la guerre d'occupation qui opposa Espagnols et Arabes, la ville d'Oran se repeuple de nombreux Juifs venus de petites cités du Maghreb, notamment de Miliana.

---Miliana, ancienne capitale des rois numides, nommée " La Perle du Zaccar"; les Français la conquièrent en 1840 : la Légion Étrangère résista au siège de l'émir Abd-el-Kader malgré la perte de 462 hommes sur 750.

---Ensuite elle devient ville coloniale après le ralliement du fils du Dey d'Alger, Hussein. Ville fortifiée à 108 km au sud-ouest d'Alger, elle jouit d'un climat sain qui nous entraîne à dire: " II fait bon y vivre en toutes saisons ".

---Je me souviens des vacances passées à Miliana. Pour l'enfant que j'étais, elle représentait le paradis sur terre. Chaque année, j'attendais avec impatience les vacances et les fêtes, des moments heureux qui me procurent encore, par la pensée, beaucoup de bonheur.

La rue Saint Paul---Grâce à la douceur du climat estival, on allait au cinéma au jardin public Magenta. Il y avait aussi les promenades le long de la rue Saint-Paul, " les Champs Élysées " milianais. Tous les habitants déambulaient. Beaucoup s'attablaient aux terrasses des cafés nombreux de chaque côté de la rue protégés par les branches des platanes qui formaient une voûte verdoyante au-dessus de l'avenue. La ballade se terminait en beauté à la " Pointe des Blagueurs", rendez-vous sacro-saint de tous pour les discussions et les durs marchandages pour toutes les transactions. Comme son nom l'indique, c'était un parapet terminé par une pointe dominant la plaine de l'Ouarsenis. On y avait un panorama splendide sur les jardins aux alentours de Margueritte et Zougala.

---Le meilleur souvenir reste le fameux " Bal des Cerises". Eh oui, grâce aux magnifiques bigarreaux, tous les ans, au mois de juin, toute la population de la région se déplaçait (y compris les Algérois), Piscine Saint Antoine/Bal dancingpour les fêter au jardin public ou à la piscine Saint-Antoine située au-dessus du parc. Son bassin était alimenté par l'eau très fraîche qui descendait du Zaccar. Des bougainvilliers odorants l'entouraient. C'est dans ce lieu frais et embaumé que j'ai appris à nager.

Le Samedi et le Dimanche, il était possible de danser sur une immense terrasse aménagée pour l'occasion avec les petites tables rondes et les chaises de couleur verte. Toute la jeunesse s'y retrouvait au son des musiques des années 1950-1960 que l'on dansait à deux. À cette époque, on n'allait pas en boîte mais à la " sauterie à Saint-Antoine ".

Tout le long des rues de la ville, l'eau qui descendait du Zaccar, chantait dans les caniveaux. Quand il faisait très chaud, je me souviens avoir enlevé mes chaussures pour y tremper mes pieds. Que c'était bon, cette eau pure et fraîche en pleine ville !!!

---MILIANA était aussi la ville des colonies de vacances pour beaucoup d'enfants de la région. Souvent la fameuse rue Saint-Paul résonnait de leurs chants joyeux.

---Pendant nos nombreux séjours à MILIANA, mon père, ma mère, mon frère et moi vivions dans la maison de ma grand-mère paternelle. À cette époque, le réfrigérateur n'existait pas encore. Les aliments étaient conservés dans l'endroit le plus frais de la maison, en l'occurrence une soupente sous l'escalier menant à la porte d'entrée. Les fruits et les légumes étaient rafraîchis à l'eau courant de la fontaine. Comme il n'y avait pas de baignoire, la toilette quotidienne se faisait sous le jet d'un tuyau relié au robinet d'eau froide (pas de mélangeur eau chaude/eau froide) dans la fontaine ayant la forme d'un petit bassin.

Mireille CHICHA

Mireille Chicha

- En 1974, je suis retournée à Alger et à Miliana. J'ai revu tous les endroits que j'ai connus avant 1962. J'ai éprouvé beaucoup de peine devant tout ce gâchis.

- Maintenant, au fur et à mesure des années qui passent, mes souvenirs se mélangent mais ils sont toujours aussi vivaces. Une constatation s'est imposée à moi avec une très grande acuité: l'Algérie me colle à la peau et cela durera jusqu'à la fin de ma vie. La douceur de vivre est à jamais perdue. II était si beau mon pays !!!

Commentaires

  • Castel AB
    • 1. Castel AB Le 18/11/2019
    Très beau témoignage, j'ai vécu là bas à Miliana de 1947 année de ma naissance à 1959. Votre témoignage a ravivé de très vieux souvenir, merci. Je ne suis plus retournée à Miliana. j'ai quitté Alger en 1966.
    Cordialement
  • Chantal
    Bonsoir Doumé,

    Quelle chance vous avez eue de voir 200 photos de Miliana des années 50 et 60 ! Je vous envie ! Etant née en 1947 et ayant quitté Miliana en 1962, l'année de mes 15 ans, je suis très attachée à ces lieux. Ils font partie de ma jeunesse !

    En ce qui me concerne, je ne parle malheureusement pas l'arabe comme votre ami Jean-Pierre et croyez bien que je le regrette !

    Bonne soirée à tous !
  • Doumé
    • 3. Doumé Le 18/02/2019
    Bonsoir Chantal, bonsoir Mireille;

    De 15h00 à 18h30 ce soir un ami rapatrié en 62 vient de me montrer suite à ma demande ses 200 photos de Miliana et Francis-Garnier, datant des années 50 et 60, j'ai vu effectivement de superbes clichés la rue Saint Paul et ses jeunes gens avec les cheveux gominés en arrières, pantalons larges à pinces, je me retrouve ce soir à faire des recherches car je suis un passionné cette période française en algérie et pourtant je n'ai pas d'origines de "la-bas" ! mon ami jean pierre est originaire de miliana, ainsi que toute sa descendance, il parle couramment l'arabe, il est revenu en france en 62 avec sa 2 chevaux et s'est installé en ardèche.
    Cordialement.
  • Serge Chétrit
    • 4. Serge Chétrit Le 19/08/2018
    Merci pour tous ces souvenirs.
    Je passais également mes vacances d'été chez ma grand-mère maternelle (Famille Ankaoua) rue saint Paul, juste en Face le grand Hotel et le marchand de bonbons "Chez Zouzou".

    Que de souvenirs !
  • Chantal
    J'ai trouvé ce texte merveilleux ! Bravo à celle (ou celui) qui l'a rédigé ! En le lisant, je me suis retrouvée bien des années en arrière. Tout y est parfaitement décrit : la rue St. Paul si chère à mon coeur puisque c'était sur cette rue que donnait la fenêtre de ma chambre ! La piscine St. Antoine où, moi aussi, j'ai appris à nager ! Sans oublier la fameuse Pointe des Blagueurs et ... la si célèbre "fête des cerises" ! Pardon aux jeunes générations car j'évoque des temps anciens et des noms qui n'existent plus même si j'ai pu remarquer, en retournant en Algérie en 2013, que bien des Milianais parlaient toujours de la rue "St. Paul" ... lol !

    Bonne fin de journée à tous !

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