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un recul de temps dans un quartier d'Alger/Par Med BRADAI

Le 1000 kg montait aggravant les derniers kms de ce col Kandek, le 1000 kg était ce camion Renault des années 60. Un clignotant de chaque cote de la cabine, faisant la sortie vers le haut et le bas de son bras pour designer une destination à prendre avec ses ridelles en bois et son chargement qu'il trainait un peu lourdement dans cette montée était composé de volailles et d'œufs. Fruit d'une semaine de collectes auprès des campagnards pour enfin être destinée aux gens de la capitale Alger "Dzair" comme on disait nous autres, et j'y faisais le voyage au beau milieu de ces picotements de jolies poules et coqs parés de toutes les couleurs en plumes. C'était les périodes de vacances, et mes voyages habituels à l'arriéré, tout le long de cette ascension dans ces périodes de chaleur juste à midi où le soleil faisait son point neutre pour donner aux hasardeux que c'est bien le moment de chercher un coin d'ombre. A l'arrière sous ce soleil d'aplomb, ma joie est tout autre, j'allais voir la capitale et restait quelques temps chez des parents revoir ce que j'ai laissé l'année dernière.Transport autrefois

La route nationale vers Alger n'était pas aussi large que maintenant, et on y passait sous les arcades le tunnel n'existait pas encore et en cours de parcours parfois j'utilisais mes astuces d'enfant pour éloigner quelques brigands de la route de mon âge, quand ils essayaient de monter, je leur balançais quelques œufs bien frais sur la face de leurs figures. AIE!!! Si père savait çà. Passé le cap de la montée, je prenais place dans la cabine, entre eux sur le couvercle du moteur qui donnait le confort d'une assise bombée.

La place était bien chaude et je sentais cette chaleur qui me brulait le dessous des jambes je ne pouvais me plaindre d'un plaisir de voyage que tout autre de mon âge souhaiterait en faire et le conter comme histoire extraordinaire. Le parcours était encore long, et nous nous arrêtions dès fois pour soulager cette mécanique au fil des kms devenue brulante par quelques litres d'eau nécessaire à son radiateur. Pendant cette pause, notre butin à vendre nous chantait quelques airs dans une chorale en cœur qu'orchestrait le coq pour nous donner cet appétit d'un repas de morceau en galette cuite avant le départ qu'on accompagne d'une gorgée d'eau gazeuse,  la route est encore longue nous disait ce brave bonhomme d'associé à mon père en tapotant la calandre de son bijou fatigué par l'usure, comme pour nous dire que le repos est fini.

Notre itinéraire étant toujours le même, on prenait cette route jusqu'à Birtouta et on remonte vers Douéra pour prendre le littoral. Il y avait plein de verdure, et la mer cette étendue bleue, nous pouvions la contempler depuis ces hauteurs d'où nous parvenait sa fraicheur. L'air sec est devenu plus humide et notre conducteur abandonna son morceau de linge qu'il passait constamment sur son front et laisser cet air de la côte lui couvrir son corps. On est presque arrivé nous disait il, comme pour justifier la lenteur de sa locomotive qui commençait à tousser des vapeurs d'inquiétude, des vapeurs d'inquiétude. Quand à moi, mon confort de trajet est devenu une plaque chauffante où chaque fois je me soulevais un peu pour laisser passer une bouffée d'air pur. Prenant cette route côtière de l'ouest d'Alger, elle nous menait tout droit à notre destination dans ces ruelles de Bab el Oued. Voilà, je vous disais bien qu'on arriverait avant la "salat d'El asr" comme s'il venait de faire un record de rallye pour préserver les œufs et ces poules qu'on entend plus leur souffle de cette chaleur torride.

Nous laissâmes, mon père et moi ce pauvre accompagnateur dans ce magasin de dépôt à décharger la marchandise et nous prenâmes la direction de "Sahat Chouhada". Chargés de deux couffins bien garnis comme tout invité doit en faire à son hôte, la rue Cervantès à Belcourt nous paraissait bien loin avec sa montée d'EL AKIBA et son marché. Allant accomplir sa prière au "djamaa el kebir" père me laissa seul avec les précieux dons à regarder ce nouveau monde, et ces immeubles dans toute leur blancheur, ces hommes et femmes qui circulaient dans tous les sens mais ne se parlaient pas oui c'était un autre monde différent du nôtre, ou seuls les enfants de notre âge nous ressemblaient dans leurs cris d'innocence. A peine sorti, père me pria de le suivre jusqu'aux arrêts des bus pour en prendre un qui nous mènera jusqu'aux "Champs de Manœuvre" et de là ne nous restera pas grand chose avec un autre bus.

Belcourt

Juste au moment de cette réunion de famille autour d'une table pour un café à prendre nous fîmes notre apparition chez les parents. Le lendemain, j'étais libre de mon père, j'allais voir un copain du quartier il était un peu plus grand que moi, il s'occupait de leur magasin. Sitôt les retrouvailles faites, qu'il prit ma main pour m'emmener dans l'arrière boutique me montrant un joli 4x4 confectionnait par lui, c'était une poussette d'enfant aménagée. En me la montrant, il me disait est ce qu'elle t'a plu, est ce qu'elle fera l'affaire...Il riait, il riait de joie et j'en fit de même. Hé oui, on est revenu à nos habitudes de l'an passé. Je pris congé de lui pour aller saluer "AMMI BOUDJEMAA", le laitier du quartier qui dès fois me racontait ses histoires qui me faisait rêver et de temps à autre me laisser pour satisfaire un gosse venu prendre une bouteille de lait. Pour les petits il leur conseillait toujours de faire attention à la chute. C'est des bouteilles en verre de marque BETTOUCHE qu'un camion livrait chaque matin dans des caissons spéciaux destinés à cela. Un quartier comme tant à Alger, quand on s'habitue il vous revient dur de le quitter, et un ami de ce quartier "Cervantès" que seule l'amitié nous a lié, m'attendait durant ces périodes de vacances pour vendre de la crème et des glaçons.

Le matin,après 09 heures on prenait notre petit 4x4 et hop c'est Clos Salembier qui nous attend et on revenait juste avant midi satisfaire notre clientèle jusqu'au soir où une partie de ballon entre grand du quartier, qui lycéens, universitaires et employés de 08 heures faisaient pendant une heure la joie de ce quartier. Il y avait parmi eux, quelqu'un à la Yul Brunner portant toujours un béret basque, il était de Khemis Miliana, il ne ratait jamais une de ces belles parties. Si je dis qu'il est d'EL Khemis je l'ai vu une fois ou deux devant ce Café BLEU ayant eu sa renommée d'antan.

De mes économies que m'attribuait mon patron d'ami, quelques pièces allait dans cette salle de cinéma juste en face du téléphérique,le reste je raflais tout ce qui était illustré en B.D (Rodeo,Yuma,Kiwi)... La liste est longue dans les rues d'EL AKIBA allant jusqu'à cette rue de la torréfaction de café NIZIERE, cela dura, quelques années après. Il ne resta de ce temps que des souvenirs qu'on évoque pour se dire qu'on était jeune comme nos enfants qu'on voit grandir et un petit sourire d'eux nous fait penser à ce recul de temps.

Commentaires

  • aziz
    • 1. aziz Le 19/02/2014
    Mes amis Ferhaoui, Mourad et toutes et tous,

    J'ai lu dans un magazine : ''Exposé depuis des années dans les plus grands musées de l'Occident. l'artiste plasticien marocain Mounir Fatmi n'a ainsi réalisé sa première exposition d'envergure dans son pays d'origine que fin 2013. Et ce n'est que lorsque le magazine américain Forbes consacre le Brésilien Joseph Safra, banquier le plus riche du monde ou le Mexicain Carlos Slim homme le plus riche du monde que l'on se souvient, au pays du Cèdre, de leurs origines libanaises et arabes. ''
    Mais comme diagnostique le journaliste Ricardo Karam : Nombres d'Arabes qui brillent se sont dissous dans leur pays d'accueil. Ils sont arabes d'origine, mais français ou américains dans le succès et j'ajouterai parceque forcés, non reconnus à leur juste valeurs et ignorés dans leur pays d'origine
  • ZOUM
    • 2. ZOUM Le 19/02/2014
    BONSOIR MON AMI L ARTISTE FERHAOUI,
    CE QUE TU AFFIRMES TOUT HAUT , C EST DU SERIEUX ET DU SOLIDE
    ET ME VA DROIT AU COEUR ET DE CE FAIT J ADHERE PLEINEMENT A TES ARGUMENTS.....CAR DANS NOTRE PAYS L ARTISTE EST NEGLIGE PAR
    NOS POUVOIRS PUBLICS.LA PROBLEMATIQUE C EST QU IL Y A UNE
    ABSENCE DE "CULTURE" DANS NOS FOYERS ( C EST LA PURE VERITE !)
    D AILLEURS COMMENT EXPLIQUEZ ,POURQUOI NOS GALERIES ET NOS
    MUSEES QUE CE SOIT A ALGER,ORAN OU AILLEURS ,N ATTIRENT PAS
    DE PUBLIC COMME C EST LE CAS AILLEURS A L ETRANGER !
    ON DIT TRES SOUVENT QUE:" Là Où ENTRE LA CULTURE, LA VIOLENCE EN SORT ".
    JE CONSIDERE QUE NOTRE PAYS DOIT FOURNIR UN EFFORT CONSIDERABLE POUR REHAUSSER L ART DANS SES DIFFERENTES
    FORMES ET REHABILITER L ARTISTE DANS SES DROITS LES PLUS
    ELEMENTAIRES . D AILLEURS, C EST A TRAVERS L ART QUE NOTRE
    PUBLIC ALGERIEN SERA ECLAIRE SUR L AMOUR DU BEAU ET AINSI
    SORTIR DE LA MONOTONIE ET DE L AGRESSIVITE DE L ENVIRONNEMENT DANS LEQUEL ON VIT.
    POUR ENCOURAGER LA PENSEE CREATIVE DANS LE DOMAINE
    ARTISTIQUE DANS NOTRE PAYS DES FACILITES MATERIELLES ET
    MORALES DEVRONT ETRE ACCORDER A NOS ARTISTES , C EST
    CE QUI SE PRATIQUE AILLEURS DANS LE MONDE.....
    LA CULTURE N EST ELLE PAS UN VECTEUR DE PROGRES D ECHANGES
    ET D OUVERTURES ?
    MOI, PERSONNELLEMENT JE SUIS CONTRE LE FAIT QUE LA CULTURE
    SOIT RESERVE UNIQUEMENT AUX RICHES C EST A DIRE A LA CLASSE
    BOURGEOISE ALGERIENNE.
    POURQUOI NE PAS REFLECHIR A LA CREATION D UNE ASSOCIATION
    NATIONALE AYANT POUR APPELATION " CULTURE DU COEUR"
    QUI SUSCITERA AUSSI LA REACTION DES DEFAVORISES AUSSI....

    AMICALEMENT

    MOURAD Z
  • ferhaoui
    • 3. ferhaoui Le 18/02/2014
    bonjour tout le monde, mon ami mourad zouaoui ,bientot la ville de constantine, capitale des arts et des lettres: de largent jeté par la fenetre quel gachis ....qui on profite!? l'artiste ,l' écrivain vas savoir? tout est dit.comme vous avez du vous en apercevoir, je ne suis pas très culture de paillettes et la poudre aux yeux!! encore davantage culture olé! olé! non pas que je dédaigne cette manifestation qui aurait pu etre comme tout événement c'est à dire un moyen de donner et du coup recevoir...non ,non, je deteste ce cirque depuis qu'il est devenu un moyen de faire la chkara sur dos des artistes toutes disciplines! et qui le mène en bateau.depuis que ces événements artistiques sont devenu monnaie courante pour avoir les projecteurs de l'actualité souvent braqués sur eux cela fait plus distingué et c'est plus rentable pour un poste plus haut. l'artiste est un emballage lorsque je pense qu'un artiste ou un dramaturge de haut niveau et talentueux vit depuis des années dans le meme atelier perché dans une terrasse,et qu'il a toutes les peines du monde, vu son age,à rejoindre ses pénates! walah c'est tout simplement injuste envers un homme qui a fait les plus belles oeuvres theatrales ou picturales. je suis sur que quand il exhalera son dernier soupir, il y aura toujours quelques requins de service qui se précipiteront devant les lumieres des caméras de l'unique acte pour afficher une mine très attristée et prononcer leur fausse compassion.c'est le destin de beaucoup honnetes,hélas!! vous connaissez certainement la fameuse hikma: de son vivant, iln'a pas eu droit à une datte,à sa mort, on lui a accroché tout un régime.wah aagoulou aarjoun! je dédie ce comentaire a tous mes amis artistes (intellectuels) morts dans l'anonymat l'ami ferhaoui,oran.
  • ZOUM
    • 4. ZOUM Le 17/02/2014
    MERCI MR/ LE LECTEUR
    VOTRE RECIT A REVEILLE EN MOI BEAUCOUP DE SOUVENIRS D ENFANCE
    C EST POURQUOI POUR TE FAIRE RIRE JE TE RACONTE CETTE BLAGUE:
    un ivrogne est affalé sur le trottoir.Un passant lui demande de rentrer
    chez lui."Connais-tu Copernic ?" lui dis l ivrogne.
    Oui,c est un astronome de chez nous qui a dit que la terre tourne
    autour du Soleil.
    Alors ,j attendrai que ma maison passe par là, lui repondit il

    AMICALEMENT
  • Meskellil
    • 5. Meskellil Le 17/02/2014
    Cher ami et grand frère,
    L'émotion est quelque part en nous, se manifestant à son gré, empruntant voies, sentiers ou chemins de traverse, nous surprenant nous-mêmes parfois, aussi. C'est l'expression d'un moment éphémère joyeux, triste... Se distancier un tant soit peu de ses émotions n'est sûrement pas se perdre, et non plus les brider
    Je vous remercie de votre appréciation même s'il est question du passé. Très agréable soirée
  • ferhaoui
    • 6. ferhaoui Le 17/02/2014
    bonjour p'tit soeur! meskellil, croyez- moi dans ces circonstances, quel bonheur de tomber entre autres sur un bon commentaire!...le votre! que je trouve attachant non seulement par la facture, mais par le ton que vous saviez y faire régner d'un bout à l'autre, car c'est une peinture faite avec amour...tout y est dans les moindre détails. l'ami ferhaoui, oran
  • Meskellil
    • 7. Meskellil Le 17/02/2014
    Bonsoir M. Mohamed Bradaï,

    J'avais totalement oublié ce texte, il y en a tellement, et je suis sûre qu'il y en a encore dans ce site que je n'ai jamais lus. Pour le plaisir, j'ai relu votre récit sur les escapades que vous faisiez enfant, et j'y ai ressenti la même fraîcheur et nostalgie qu'il y a quelques mois. Il est des récits qui s'usent, qui perdent de leur épaisseur quand on les lit plusieurs fois. Celui-ci non. On sent encore l'enfant à travers l'adulte qui raconte, ce regard émerveillé, ces joies simples qui remplissent de bonheur, cet enthousiasme, ce monde fantastique des enfants dans lequel les adultes ont peu de place. Je ressens bien votre émotion parce qu'elle fait aussi écho en moi quand ces moments magiques de l'enfance me reviennent en mémoire. Je suis allée un jour retrouver la magie d'un endroit plein de souvenirs à chaque coin et recoin...J'ai compris que ce n'était pas le lieu qui était magique, mais les souvenirs et l'histoire que j'en avais construits. Alors quand des années plus tard, on retrouve les émotions liées au lieu peuplé de nos souvenirs d'enfance, alors je crois (mais je ne suis pas sûre) qu'on est heureux l'instant de ce retour en soi.
  • Bradai
    • 8. Bradai Le 17/02/2014
    @Meskelil que je salue encore une fois .
    C'est difficile d'oublier un endroit surtout celui qui vous en a marqué l' enfance . Je suis retourné ces derniers jours à cette rue Cervantes aux hauteurs de Belcourt ,rue d'une enfance passée pendant les vacances scolaires et croyez moi j'ai versé quelques larmes en pensant à chaque recoin des rues du marché d'el okiba jusqu'au deux telepheriques de la Belouizdad ('ex rue de lyon) .
  • Meskellil
    • 9. Meskellil Le 01/09/2013
    Bonjour à toutes et à tous,
    Je suis tombée sur votre texte M. Bradai et bien m'en a pris. Il est plein de fraîcheur et de nostalgie. Je me rappelle quelques rares virées faites à Alger en famille. Ces voyages rarissimes étaient inespérés, je me sentais pousser des ailes, j'étais heureuse! Je me rappelle essayer de garder en mémoire la moindre montagne, le moindre arbre, la moindre maison nichée dans les hauteurs, la mer surtout, immense et impressionnante. J''avais les yeux partout, et ne voulais pas perdre une miette du paysage qui défilait de chaque côté de la route. Il fallait que je fasse le plein de souvenirs pour pouvoir les rappeler quand je le souhaitais, que je puisse en rêver encore et encore! Je ne savais pas si, ni quand j'aurais encore la chance d'aller à Alger. C'était magique! A l'époque, je crois que le père Ghersi de Miliana avait un camion gris comme celui que vous décrivez, avec lequel il travaillait également?
    Amicalement

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