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Les Jardins de Miliana/ De MM. A.PRENANT et H.DELANNOY

Effets de la prolétarisation d’une banlieue maraîchère et fruitière

 Cette communication expose les résultats obtenus en 1955 par H.Delannoy, remis à jour, à l'issue de deux brefs séjours à Miliana en Janvier et Avril 1960, par A. Prenant, avec l'aide d'un étudiant  parisien, M.Levallois, et grâce à la compréhension et à l'aide apportées par les autoritées algériennes.

 

Comme pour la plupart des villes du Maghreb, la possession d’un riche terroir, offrant des possibilités d’irrigation et de spécialisations délicates, peut être considérée, à Miliana comme une des conditions de l’existence de la ville. Tous les textes, depuis El Bekri jusqu’à la conquête coloniale française, en 1840, attestent le rôle déterminant du revenu des jardins et vergers dans la fortune citadine.

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Il y a autour de Miliana, des jardins et des vergers bien tenus, dans lesquels on trouve beaucoup de vignes, de cerisiers, de poiriers et de pommiers. (Dans la plaine), un grand ruisseau qui vient de Miliana (Oued Boutan) distribue ses eaux dans une infinité de petits canaux pratiqués exprès pour l’irrigation des rizières.

Des conditions naturelles favorables au jardinage

Dans l’ensemble, l’irrigation de ces deux terroirs a été, dans l’histoire, permise par l’abondance et la régularité relative (car elle subit d’importante fluctuations d’une année sur l’autre), des sources qui jaillissent, au contact des argiles formant les bas versants (en contrebas de la ville), de la masse karstique du Zaccar, dominant la ville de ses pentes rocheuses et abruptes. Le débit moyen de 452 litres/secondes permettrait théoriquement de distribuer une tranche d’eau annuelle de un mètre sur près de 1.500 ha. Traditionnellement, la fraction de ces eaux recueillie soit sur la principale ligne de sources, débitant les 9/10 des eaux de la nappe karstique (411 m3/sec) vers 740 m d’altitude, sur le contact calcaire/schistes, soit sur d’autres sources moins importantes et isolées, au pied des travertins ou même plus en aval, permet d’arroser, par un réseau de canaux recoupant obliquement les courbes de niveau. Les sols fertiles des interfluves, ou, comme à Hammama, d’alimenter des cultures ponctuelles, ou, comme à Aïn Bercouq et Zougala, de relayer le réseau général. Le surplus, prélevé, avant la période coloniale, à partir de barrages de dérivation établis sur l’Oued Boutan, servait à irriguer le terroir de plaine, aujourd’hui incorporé au périmètre du barrage du Ghrib.

La disposition des sources entraine, selon les quartiers, une inégalité dans la valeur d’utilisation des terres. Leur utilisation permet en effet actuellement d’irriguer la totalité des 36 ha d’Aïn Bercouq, 55% des 285 ha du quartier Annassers, contre environ 40% des 310 ha de Zougala, 20% des 410 de Hammama, 22% des 425 ha d’Oued Rihane. Ces surfaces représentent une masse irrigable de 406 ha groupés au Sud et à l’Est de la ville, et très secondairement à l’Ouest, que traduit dans le paysage.  L’abondance des arbres, la multiplicité des banquettes découpant le versant et le semis très serré des habitations ; un îlot de 37 ha à 1 km au Nord-Ouest sur Oued Rihane, deux îlots groupant 34 ha à l’Est (Aïn Berda) et à l’Est-Nord-Est (Hammama) dans le quartier de ce nom ; soit en tout 477 ha sur les bas versants du Zaccar, aujourd’hui encore inclus dans la commune de Miliana.

Les densités de population (2.263, 1.530, 533, 247 et 371 habitants au kilomètre carré respectivement (pour Aïn Bercouq, Annassers, Zougala, Hammama et Oued Rihane) semblaient en 1954 traduire assez exactement l’inégale répartition des zones irriguées. En réalité, l’importance des facteurs étrangers à l’activité horticole laisse penser qu’il ne s’agissait là que d’un ajustement instable représentant une coïncidence momentanée.

Caractères de l’économie horticole précoloniale

En effet, les documents sur Miliana à la veille de la colonisation ne mentionnent aucun édifice extra-muros, hormis quelques moulins et les forges d’Abdelkader. Le séquestre établi alors ne porte, en ce qui concerne la propriété bâtie, que sur « 490 immeubles urbains » intra-muros.

Les biens fonciers séquestrés paraissent au contraire sous la forme de propriétés couvrant en général plusieurs hectares chacune, en partie dans la zone horticole, en partie dans la zone de culture vivrière sèche ou irriguée, autour d’El-Khémis, appartenant ou ayant appartenu pratiquement à chacune des grandes familles citadines. Celles-ci cumulaient donc la rente foncière, le produit de la production agricole de certains des leurs, et de l’activité commerciale ou artisanale des autres. Une partie du travail agricole était assurée, lors des gros travaux, par des ruraux venus en immigration temporaire des tribus voisines, en particulier des Righa, installés immédiatement à l’Est, et campant dans des tentes ou des gourbis provisoires. L’économie des jardins n’était donc pas autonome, et représentait un élément se combinant avec l’économie proprement urbaine d’une ville dont la population, estimée à 6.000 habitants ou peut l’être au minimum à 5.000 (pour un taux de 10 habitants par unité familiale occupant une demeure).

Deux conséquences de la colonisation sur la répartition de la population. Dispersion des citadins dans la banlieue et pourtant déruralisation.

C’est le fait colonial qui provoque la dispersion des citadins dans leurs jardins : dès 1844, sur 1.805 Musulmans présents, 972 (54%) sont dénombrés en banlieue : l’abandon de la ville. A l’approche des troupes françaises, l’achèvement de sa ruine par ces dernières, l’occupation par une nombreuse population coloniale d’immeubles urbains placés sous séquestre et non restitués à leurs légitimes propriétaires restés longtemps réfugiés dans la campagne, imposent cette mutation : intra-muros, n’étaient revenus, en 1843, que 110 Musulmans et 112 Juifs ; en 1844, 1.182 Algériens, dont 350 Juifs ; sur l’ensemble de la commune (Affreville compris), une population comparable à celle de 1840 (5.651 Algériens dont 847 Juifs). Cependant les Européens étaient passés, sur le territoire, de 324 fin 1843 à 1.278 en 1847, 1.418 en 1854, 2.172 (dont 1.598 intra-muros) en 1866, 2.242 (dont 1.662 intra-muros) en 1871.

Initialement, les citadins se muent en ruraux : en 1871, d’après des sondages dans l’Etat-Civil, le secteur d’activité agricole occupe 91% des Musulmans à Hammama, 89% à Aïn Bercouq, 88% aux Annassers, 84% à Zougala, 67% à Oued Rihane.

Par la suite, l’évolution du pourcentage d’actifs agricoles est résumée par le tableau ci-dessous :

Année 1881 1901 1911 1921 1931 1948 1954
Aïn Bercouq 100% 78% 90% 90% 82% 79% 54%
Annassers 87% 80% 70% 46% 43% 40% 27%
Zougala 84% 82% 77% 90% 62% 81% 61%
Hammama 100% 100% 100% 86% 86% 55% 22%
Oued-Rihane 100% 100% 75% 78% 88% 77% 41%

 

En fait, la déruralisation, inégale et échelonnée dans le temps, qu’indique ce tableau, est d’autant plus sensible que le pourcentage des « journaliers », salariés susceptibles de travailler ailleurs que dans l’agriculture, par rapport à l’ensemble, sauf lorsque il est « épongé » par d’autres activités, dans une population numériquement stable :

 « L’armée française trouve Miliana livrée aux flammes ; aux ravages de l’incendie vinrent se joindre d’inévitables dégradations, conséquences de l’abandon de la ville par ses habitants et des premières nécessités de l’occupation militaire. » (Tableau de la situation…, 1840).

% des journaliers, par rapport aux agricoles de : 1871 1881 1901 1911 1921 1931 1948 1954
Aïn Bercouq 38% 38% 38% 46% 33% 64% 42% 30%
Annassers 23% 31% 53% 43% 58% 63% 70% 50%
Zougala 11% 11% 9% 33% 33% 33% 40% 60%
Hammama 20% 30% 33% ? 50% 67% 70% 50%
Oued-Rihane 25% 67% 77% 50% 72% 80% 86% 86%

 

Ainsi, statiquement, la déruralisation s’est accompagnée d’une sous-prolétarisation et d’une prolétarisation.

Ces transformations se sont opérées d’abord dans les quartiers les plus touchés par la colonisation, Zougala et Annassers, à la fin du XIX siècle. Une deuxième étape, transformant Annassers en une zone d’allure suburbaine, se produit après 1911 ; puis c’est Oued Rihane qui est touché, une première fois, aussitôt après la première guerre mondiale, avant de subir, avec tous les quartiers, une péjoration après 1930 ; aussitôt avant, et après la deuxième guerre mondiale, ce quartier et celui de Hammama, jusqu’alors à peine touchés, subissent la mutation la plus spectaculaire, Zougala la ressent à un moindre degré. Aïn Bercouq, bien que niché immédiatement sous les remparts de la ville, y échappe seul encore aujourd’hui et reste presque exclusivement rural.

Cette inégalité de rythme est liée à la transformation progressive des quartiers de la banlieue horticole en zone d’acclimatation d’immigrants des campagnes : la population de la banlieue s’est globalement multipliée par 10 en un siècle (9.480 Algériens Musulmans en 1954 contre 972 en 1844), alors que la ville, intra-muros, n’arrivait qu’au chiffre de 3.032 (à peine trois fois le chiffre de 1844 moins qu’avant la conquête coloniale). Cet accroissement est plusieurs fois supérieur à l’accroissement naturel. Il s’est opéré au fur et à mesure des transformations des structures économiques et sociales dans les différents quartiers.

Ainsi, on peut estimer qu’Aïn Bercouq, la densité de population (9), de 1.200 hab/km2 en 1891, est régulièrement passée à 1.500 en 1906, 1.800 en 1936, 2.230 en 1054, selon une courbe légèrement décroissante supposant une émigration.

 « La population des différents quartiers ne faisait pas l’objet d’une rubrique du recensement avant 1936. Elle a été évaluée à partir de l’Etat-Civil en admettant des conditions démographiques analogues d’un quartier à l’autre.»

Aux Annassers, par contre, la densité kilométrique de la population, passant seulement de 550 à 650 entre 1891 et 1906 bondit brutalement à 800 en 1911, se stabilise à ce niveau jusqu’en 1931, puis subit une nouvelle poussée atteignant 1.060 en 1936, avant de croître (jusqu’à 1.530), sans apport extérieur évident. Si l’accroissement du peuplement y concernait, jusqu’en 1911, l’importante minorité européenne, il s’est fait depuis en dépit de leur départ progressif, presque total aujourd’hui.

A Zougala, une première poussée de 1891 à 1906, pendant laquelle la densité passe de 270 à 470 environ, inexplicable sans une forte immigration, précède une longue stagnation, la reprise démographique postérieure à 1936 s’expliquant par le seul accroissement naturel.

A Hammama, de même, une première augmentation de la densité encore que moins marquée (de 120 à 150 entre 1891 et 1901), est suivie d’une stagnation jusqu’en 1936. Depuis cette date, au contraire, et surtout depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, l’accroissement implique une forte immigration, puisque la population double pratiquement en vingt ans.

A Oued Rihane, enfin, la densité de population, restée relativement très basse (autour de 70 au Km2) jusqu’en 1921, passe brutalement à 115 en 1926-1931, puis triple de 1931 à 1948, avant de subir la plus forte poussée depuis l’insurrection de 1954.

Des sondages dans l’Etat civil permettent de confirmer le rôle de l’immigration : ceux opérés pour l’année 1931 montrent, pour la population en âge de procréer, une proportion particulièrement faible (22%) d’originaires de la commune, à Oued Rihane ; particulièrement forte au contraire aux Annassers et Zougala (50%), et surtout en ce qui concerne ce dernier quartier où les étrangers sont principalement des Beni-Menacer, une immigration ancienne, plus constante et d’origines plus diverses aux Annassers, l’absence d’immigration dans les deux autres quartiers. Les données de 1954, pour les classes d’âge équivalentes (30% d’originaires de la commune à Oued Rihane, 40% à Hammama et aux Annassers, contre 44% à Zougala et 72% à Aïn Bercouq) montrent la nullité de l’immigration à Aïn Bercouq, sa faiblesse à Zougala, sa constance aux Annassers, et les nouvelles poussées affectant Oued Rihane et surtout Hammama.

Le poids des facteurs extérieurs à l’économie horticole

Ces transformations démographiques résultent évidemment de facteurs extérieurs à l’économie horticole, qu’elles contribuent à bouleverser :

- Autour de 1900, pour Zougala et Hammama, l’afflux de populations rurales touchées par la crise agraire dans le Cheliff en voie de colonisation apporte une modification des structures sociales, mais non de l’orientation agricole de ces quartiers.

- Autour de la deuxième guerre mondiale, l’ouverture des mines de fer détermine cette fois un changement fondamental d’orientation des Annassers : dès 1911, 2% des Musulmans, 54% des Européens de ce quartier travaillent à la mine ; en 1921, 10% des Musulmans, 10% des Européens, dont le nombre absolu diminue ; la stagnation démographique postérieure est liée à celle de l’extraction : en 1931, 10% des Musulmans, 50% des Européens sont encore des mineurs.

- C’est le même phénomène qui se produit à Oued Rihane au lendemain de la première guerre mondiale : la population non agricole y comprend alors presqu’exclusivement des mineurs, mais le réaménagement de l’irrigation, en 1923, entraine également la fixation de travailleurs agricoles.

- Les fluctuations de la production de minerai règlent désormais l’évolution des Annassers et d’Oued Rihane, notamment l’accroissement de leur population en 1936. Cependant, des phénomènes extérieurs, comme la crise agraire ouverte par la deuxième guerre mondiale, puis tout récemment, pendant la guerre d’indépendance, la création de zones interdites, le quadrillage, les regroupements accompagnés de la destruction de l’habitat rural, répercutent sur la banlieue de Miliana les mêmes phénomènes de déséquilibre des campagnes que dans les autres villes d’Algérie. Ce sont les quartiers où la densité de population, en particulier la densité agricole est la moins forte, Hammama et Oued Rihane, qui reçoivent tout d’abord ce surplus d’immigrants, en partie absorbés, professionnellement, par la mine, avant que les terres les plus éloignées de ces quartiers ne subissent à leur tour directement les effets de la guerre.

Ainsi, la mine est-elle devenue le principal facteur de fixation, comme l’indique un tableau du pourcentage des mineurs dans les différents quartiers lors des recensements de 1948 et 1954 :

Tableau : pourcentage des mineurs dans la population active et (entre parenthèse)

Dans la population active non agricole algérienne.

Quartier Annassers Zougala Hammama Oued Rihane Aïn Bercouq
Année - - - - -
1948 ....

33%

55%

5%

28%

29%

65%

10%

45%

2%

9%

1954 ....

29%

36%

14%

36%

60%

75%

25%

60%

15%

31%

 

Les salaires des mineurs ne constituent plus, dans trois des quartiers au moins, un seul appoint au produit du jardinage.

Celui-ci devient la ressource subordonnée, et les modifications survenues dans la structure de la propriété et de l’exploitation de la huerta ont enlevé son indépendance, dans la plupart des cas, à l’économie agricole.

La destruction de l’équilibre interne de l’économie horticole

Les premières atteintes à l’équilibre interne de l’économie horticole résultent de la colonisation ; c’est tout d’abord l’amputation de tout le terroir de plaine irrigué, livré à la colonisation pour la constitution du centre d’Affreville en 1849, et dont et dans les grandes pièces de terre contrastent aujourd’hui avec le morcellement des jardins du versant. Le remplacement, en 1923, des dérivations de l’Oued Boutan, traditionnellement consacrées à arroser ce terroir, par le prélèvement – de 125 1. /sec. – à la nouvelle source des mines d’Oued Rihane ne laissent que 327. /sec, pour l’irrigation des jardins.

C’est ensuite l’extension de la propriété coloniale, dans la huerta elle-même : initialement, 19 exploitations considérées comme beylicales, conservées au domaine à la suite du séquestre, louées, puis alloties à des Européens ; une population rurale européenne rapidement installée sur ses terres dans les jardins irrigués, représente en 1871 environ la moitié de la population d’Oued Rihane, le quart de celle de Zougala, le cinquième de celle des Annassers, 10% environ de celle de Hammama et de Aïn Bercouq. En 1917, l’enquête sur la propriété foncière en Algérie attribuait aux Européens 905 hectares sur 1.797 appropriés (plus de 50%), dont 537 sur 1.429 hectares de terres cultivées (37%). En 1954, à la veille de l’insurrection, 486 Européens, malgré un léger recul, se partageaient encore 820 ha, plus de 48% de la propriété privée de la commune bien que le nombre des agriculteurs résidant parmi eux ait considérablement diminué. Leur part de terre irriguée était presque aussi importante : 36% de la surface, entre les mains de 75 irrigants : 33% aux Annassers, 64% à Hammama, 30% à Zougala, 60% à Oued Rihane, 0% à Aïn Bercouq. C’est dire que, même dans la huerta, la population agricole algérienne n’avait pas conservé les 2/3 de ses terres, et de l’usage des eaux.

La désadaptation du réseau d’irrigation à cette nouvelle structure a constitué un autre facteur de déséquilibre ; confié après la colonisation, aux Ponts et Chaussées, puis concédé par un arrêté préfectoral du 16 Juin 1870 à un syndicat d’irrigants, le réseau, entièrement restauré à cette date pour la dernière fois, n’a pu depuis, être entretenu sérieusement. Composé de 30 km de canaux principaux, en demi-buses exposées à se disjoindre et à subir l’évaporation, alimentant eux-mêmes, par un système de vannes quelques 50 kilomètres de canaux secondaires desservant les jardins, il constitue par lui-même un système sans souplesse. Le mode de distribution aux membres du syndicat, attribuant, à raison de deux tours, l’un nocturne, l’autre diurne, dix minutes d’arrosage hebdomadaire pour cinq ares, rend aléatoire, en fonction des détériorations des canaux aggravant l’irrégularité du débit, l’irrigation des petites parcelles ; seules les exploitations disposant d’un bassin de retenue échappent à ce risque. En outre, la présence nécessaire aux heures obligatoires d’attribution impose aux irrigants ayant une autre activité professionnelle l’emploi d’une main-d’œuvre salariée, souvent très couteuse pour les petits exploitants.

La modicité des taxes d’irrigation (70 F par hectare en 1939, 2.600 en 1955) éliminait bien un obstacle financier pour les petits exploitants, mais constituait un apport insuffisant (1.200.000 F en 1955) pour permettre l’entretien du réseau : en 1955, 160,000 F seulement étaient consacrés à la constitution du Fond de réserve nécessaire, représentant la valeur formelle du réseau, soit 15 millions. A cette date, une subvention de 8à millions pour la réfection fut demandée au gouvernement général ; mais le conflit qui suivit immédiatement, l’abandon de nombreuses irrigations et mêmes de nombreuses terres, ne permirent pas de mener à bien cette tâche, et l’indépendance de l’Algérie a trouvé le réseau dans un état de dégradation accentué.

      La répartition des terres

L’accentuation du morcellement

La propriété de Miliana est caractérisée par une extrême inégalité, statistiquement (fig.1) aussi bien que dans l’espace (carte II), cette inégalité n’a fait que s’aggraver, en particulier depuis la deuxième guerre mondiale ; depuis 1954, jusqu’à l’indépendance, cette évolution n’a fait que s’accentuer.

Dans l’ensemble de la commune, le nombre des propriétaires qui était d’environ 800 en 1938, était en 1954 de 1.036 ; il est de 1.227 au lendemain de l’indépendance. Mais la moyenne d’1 ha, 5 par propriété n’a aucune signification ; comme l’indique le tableau ci-dessous :

Tableau : Evolution (en pourcentage) du nombre des propriétés par catégorie et de la surface qu’elles représentent, 1954-1962 (on a pris comme unité, l’unité de surface irriguée et ramené les terres non irriguées, bois et parcours à l’unité représentée par leur valeur).

1954,% du nombre des propriétaires 0-5 a 5-10 a 10-20 a 20-50 a 50-100 a 1-2 ha 2-5 ha 5-10 ha + de 10 ha

17%

22%

16%

19%

14%

16%

20%

16,6%

13,5%

12%

9,8%

7,5%

7,2%

5,4%

1,2%

0,8%

1,4%

0,9%

1962% de la superficie possédée

  1954....

  1962....

0,4 % 0,7 % 1,1 % 4,4 % 6,5 % 15 % 15,5 % 14,5 % 41,9 %
0,7 % 1 % 1,4 % 6 % 7,8 % 14,3 % 14,5 % 13,5 % 40,2 %

 

La très petite propriété, au-dessous de 20 ares, si elle ne couvre qu’une très faible superficie, finit pourtant par être partagée entre 57% des propriétaires ; une partie des moyens propriétaires, dont le nombre absolu augmente cependant, ont fractionné leurs terres, mais le morcellement des grandes propriétés (de 1 à 10 ha en valeur de terre irriguée) a, par ailleurs, accru le nombre de ces propriétés de moyenne importance, d’une superficie en général plus étendue que les précédentes. Les latifundia, malgré une perte sensible en superficie, conservent une proportion à peine diminuée des terres.

Le rôle joué par la propriété coloniale dans cette répartition des terres est évident. En 1954, sur l’ensemble de la commune, la ventilation de la propriété européenne était la suivante.

Nombre de propriétés :

Superficie :

Moins de

20 a

de 20 à

100 a

de 1 à

5 ha

de 5 à

10 ha

+ de

10 ha

9

0,8 ha

(0,1%)

14

10 ha

(1,2%)

51

188 ha

(23%)

5

67 ha

(8%)

8

535 ha

(67%)

 

Les huit grands domaines ne sont irrigués que sur une faible fraction de leur étendue, mais les exploitations de 1 à 5 ha sont presque intégralement irriguées.

Il apparait sur ce tableau de la propriété coloniale que le déséquilibre de la répartition de la propriété Musulmane est plus marqué encore que celui qui affecte l’ensemble de la propriété : à côté de 18% et 19% de très grands et grands domaines, et, à l’opposé, de 4% de très petites propriétés, les Musulmans ne disposaient que de 36% de propriétés entre 1 et 5 ha, en grande partie non irriguées, et de 23% de propriétés entre 20 et 100 ares.

La part de ces différentes catégories de propriétés incluses dans la zone horticole ne modifiait pas les conditions générales :

Nombre d'irrigants :

 

 

 - Européens :

- Algériens :

0-5 a 5-10 a 10-20 a 20-50 a 50-100 a 1-2 ha 2-5 ha 5-10 ha + de 10 ha

49

6,7%

0

49

86

13,7%

10

76

131

20,6%

5

126

142

24,5%

8

134

87

13,8%

7

80

61

9,6%

12

49

59

9,3%

33

26

8

1,2%

5

3

5

0,7%

3

2

 

Surfaces irriguées :

Par les Européens :

Par les Algériens :

ha

1,6

0

1,6

ha

5,8

0,7

5,1

ha

18,3

0,6

17,7

ha

44,6

2,8

41,8

ha

62,1

4,5

57,6

ha

83,6

17,6

66

ha

183

98

85

ha

48,8

31,3

17,5

ha

73

52

21

 

Comme l’indique le tableau, la moitié des irrigants européens, soit 6% des irrigants, se réservaient 36% des terres irriguées (ou 95% des terres irriguées européennes). De la sorte, 8% des terres irriguées par des Algériens l’étaient par des propriétaires de moins de 20 ares, représentant 40% des irrigants. Ce rôle des minimifundiaires dans l’exploitation de la huerta, accru encore par les transactions postérieures à 1954, constitue un des facteurs de la sous-utilisation des moyens d’irrigation.

Les techniques d’exploitation traditionnelles sont en effet difficilement compatibles avec cet extrême morcellement. Les versants irrigués sont partagés en terrasses perpendiculaires à la ligne de pente ; ces terrasses, limitées par des talus de terre étayés par une rangée d’arbres fruitiers, alimentées chacune par une rigole passant au pied du talus d’amont, constituent ainsi des parcelles naturelles d’exploitation, dont la superficie, dépendant de la distance, entre deux talus, et de l’écartement entre les canaux de desserte, est généralement de l’ordre de 10 à 50 ares. Cette bande étroite allongée selon les courbes de niveaux supporte normalement des cultures maraîchères. L’exploitation comporte donc deux sources de revenus provenant de deux types de production, l’une fruitière, provenant des arbres de talus (cerisiers, pruniers principalement), l’autre, légumière, dont le produit peut être étalé sur toute l’année (oignons, fèves, pommes de terre au Printemps, tomates l’Eté, etc…). Normalement, seule, cette production légumière permet à l’exploitation d’être bénéficiaires ; les fruits, dont la commercialisation était auparavant fort importante, permettent de se procurer les frais de culture. Ceux-ci comportent au minimum un mois de travail de jardinier pour 10 ares, (préparation de la terre, construction des billons, semailles, distribution bihebdomadaires des eaux, binage, etc…) ; c’est dire que la surface optima que peut travailler un exploitant est de l’ordre d’un peu moins d’un hectare, groupant de quatre à dix parcelles, de préférence d’un seul tenant. Ce type d’exploitation était autrefois le plus fréquent.

Dans la mesure où les exploitations ont été morcelées, l’équilibre de leur économie a disparue. Nombre de petits exploitants avaient, dès avant 1954, renoncé à irriguer,….le nombre des « lacunes » sur les registres de distributions d’eau était de plus en plus notable ; tantôt la parcelle était entièrement complantée d’arbres fruitiers, supprimant la part commercialisable de la culture maraîchère. Tantôt, du fait du vieillissement des arbres, renouvelés pour la plupart lors de la restauration du réseau, les fruitiers furent arrachés après la deuxième guerre mondiale et ne purent, faute de moyens, être remplacés, par les propriétaires des jardins les plus exigus : c’est ainsi que Zougala est en grande partie envahie par les vergers demi-spontanés, et que les coteaux de Djedaïn aux Annassers, face à Aïn Bercouq, se composent de jardins nus.

En résumé, de l’opposition croissante entre quelques latifundia et une foule de petites exploitations sont nées des difficultés techniques et économiques croissantes : impossibilité, dans certains cas, d’irriguer : impossibilité, plus souvent, de remplacer les arbres vieillis ; impossibilité d’assurer les frais de culture dans le domaine maraîcher ; impossibilité d’assurer convenablement l’entretien des arbres et la fumure ; impossibilité de supporter en l’absence de cultures maraîchères, l’irrégularité de la production fruitière. Dans ce domaine, les difficultés pour les petits producteurs, --- même si leur carte de maraîchers leur donnait accès au marché de Miliana, --- à écouler eux-mêmes leur production les mettait dans la dépendance, pour l’expédition sur Alger, et à plus forte raison pour l’exportation, d’un agriculteur européen de Zougala, A…qui a aujourd’hui vendu son bien à la commune avant de quitter l’Algérie.

Le rôle croissant des propriétaires n’exerçant pas une profession agricole

C’est à la fois une conséquence de l’accroissement démographique, de l’importance prise par la mine, et des difficultés croissantes rencontrées par les producteurs : le produit de la culture apportait un bénéfice de plus en plus incertain, mais le prix de la terre ne baissait pas. Les salaires de la mine étant insuffisants pour permettre à beaucoup de familles de se loger en ville, l’incertitude de l’emploi les obligeait à se procurer une garantie de ressources alimentaires, nombre de mineurs préféraient consacrer leurs économies à louer, relativement cher, un logement et une parcelle de terre dans la banlieue agricole ; c’était pour les minimifundiaires un revenu plus sûr que d’exploiter eux-mêmes. C’est à des cas de ce genre que sont dues, numériquement, la plupart des exploitations indirectes, les regroupements de propriétés trop petites, ou appartenant à des propriétaires non-résidents en exploitations plus rentables ne concernant qu’une dizaine d’unités couvrant une vingtaine d’hectares (l’exploitation directe même pour des non-résidents ou des non-agricoles, restant la règle, avec l’emploi salarié de jardiniers et journaliers). De plus en plus, les mineurs ont consacré leurs économies à acheter une parcelle, soit celle sur laquelle ils étaient locataires avec le logement, soit une autre sur laquelle ils construisaient un gourbi ou une maison valant de 100.000 à 300.000 F. C’est à notre avis cette faim de petites parcelles qui a maintenu le prix de la terre, --- le verger irrigué, se vendant, entre 1955 et 1962, de 200 à 300 F le mètre aux Annassers (le plus urbanisé), 150 à 200 F à Zougala, 80 à 100 F à Oued Rihane et Hammama, la terre en sec elle-même passant de 10 à 30 F le mètre dans la même période (localement 50 F) --- ; ce sont des prix qui atteignent parfois celui des terrains à bâtir.

Dans ces conditions, de plus en plus nombreux ont été les petits jardiniers à parceller ce qui leur restait et à se transformer eux-mêmes, ou leurs enfants, en mineurs ; nombre de propriétaires européens --- soit les deux latifundiaires de Hammama (M., résidant en ville et L., d’Alger), d’autres rentiers de la terre ou commerçants ---, à détailler tout ou partie de leur bien. A partir de 1953, surtout entre des immigrés récents des Righa (à Hammama) ou des Beni Menacer (à Oued Rihane), entre des mineurs, hospitaliers, journaliers, aux Annassers surtout.

C’est ce qu’expriment la carte II, les courbes de la fig. A : déjà en 1954, dans la huerta, 93 irrigants étaient des mineurs, 27 d’autres salariés, 86 des commerçants, artisans, petits patrons, 46 des fonctionnaires ou membres des professions libérales, se partageant respectivement 31 ha, 7 ha, 61 ha, 35 ha contre seulement 165 jardiniers et agriculteurs, détenant 188 ha et 102 propriétaires fonciers, détenant 120 ha.

Cette prédominance numérique des non-agriculteurs, irriguant en moyenne des surfaces plus restreintes (en moyenne 30 a par mineur, 75 par petit patron, contre 1 ha 10 par jardinier et 1 ha 50 par propriétaire foncier, européens compris), n’a pu que rendre les problèmes plus aigus : une fraction croissante de la terre irriguée a été vouée de plus en plus à satisfaire, dans des conditions techniques déficientes, une partie des besoins alimentaires familiaux, aux dépens de la production commercialisable.

L’éclatement de la crise pendant la guerre d’indépendance et les difficultés d’une solution

La crise, latente depuis la deuxième guerre mondiale, est devenue évidente après l’insurrection de 1954. Outre qu’à partir surtout de 1954, de nombreuses terres, principalement à Hammama et Oued Rihane, quartiers en partie excentriques, cessèrent d’être travaillées --- soit que les exploitants aient été victimes de la répression, soit que les maisons (une cinquantaine) aient été détruites ---, les processus de dégradation antérieurs se sont accélérés. Nombre de terres européennes ont fait l’objet de spéculations, soit qu’elles soient morcelées, soit qu’en 1962 elles aient été rachetées en bloc, par la délégation spéciale de création coloniale, pour la commune qui aujourd’hui les loue à bail, ou par des commerçants de la ville pour qui elles ne sont également qu’objet de spéculation. Des propriétaires Algériens ont également spéculé sur l’afflux d’immigrants, le surpeuplement des logements urbains et la faim de terre des mineurs : une propriété de 5 ha à Hammama, une autre de 3 ha 5 à la limite de Zougala et d’Oued Rihane (rachetée en 1952 à un Européen), en sont les meilleurs exemples. L’espace urbain, d’autre part, s’est étendu aux dépens des Annassers (cité Musulmane, H.L.M). Partout, le couvre-feu nocturne a empêché l’irrigation de fonctionner normalement, et le réseau n’a reçu aucun entretien.

L’importance de l’accélération du morcellement correspond bien, dans chaque quartier, à celle de la « déruralisation », liée à la prolétarisation. C’est ce qu’indique le tableau ci-dessous :

Tableau : Evolution du nombre de propriétaires par quartier

1954-1962

 

Annassers :

   1954 .......

   1963 .......

0-5 a 5-10 a 10-20 a 20-50 a 50-100 a 1-2 ha 2-5 ha + de 5 ha

 

20%

26%

 

21%

25%

 

19%

20,5%

 

16,5%

12%

 

10,5%

7,5%

 

5,5%

4%

 

5,3%

4%

 

2%

1%

Zougala :

   1954 .......

   1963 .......

 

10%

14%

 

18%

22%

 

13,5%

13,5%

 

19,5%

18,5%

 

15%

12,5%

 

12,5%

10,7%

 

10,5%

8%

 

1%

0,8%

Aïn Bercouq :

   1954 .......

   1963 .......

8%

7%

19%

22%

18%

18%

20%

20%

23%

24%

7%

6%

5%

4%

0

Hammama :

   1954 .......

   1963 .......

 

8%

9%

 

8%

11%

 

12%

16%

 

31%

31%

 

14,5%

13%

 

18%

12%

 

34,5%

2%

 

5%

6%

Oued Rihane :

   1954 .......

   1963 .......

 

41%

50%

 

6%

9%

 

5,5%

3%

 

10%

10%

 

10,5%

7,5%

 

10%

6,5%

 

14%

11%

 

5%

3%

 

Ces modifications de pourcentage correspondent à un accroissement du nombre des propriétaires allant de 0 à Aïn Bercouq à 6% à Zougala, 22% aux Annassers, 23% à Oued Rihane, 36% à Hammama : leur multiplication est bien corrélative du rythme de déruralisation des différents quartiers. La poussée des minimifundiaires traduit le rythme de prolétarisation des différents quartiers, le recul des exploitations de 1 à 5 ha, le degré d’abandon par les colons Européens, le recul du nombre des propriétaires de 50 à 100 a exprime assez exactement le rythme de dégradation de la vocation horticole des différents quartiers.

La situation du jardinage à Miliana parait, au vu de ces données, bien délicate à l’aube de l’Algérie indépendante ; celle de l’agriculture en général est encore aggravée du fait que, des trois grands latifundia, deux, ceux de Hammama, devenus biens vacants, n’ont pu être à temps confiés à des comités de gestion.

Le troisième, appartenant à la Société des Mines du Zaccar, loin de fondre ces dernières années, s’est au contraire agrandi ; mais il constitue plus un capital qu’un moyen de production intensive.

Depuis l’indépendance, des travaux de restauration ont été entrepris sur le réseau d’irrigation, en utilisant les chantiers du chômage. Le canal 9 a pu ainsi être rénové. Si de nombreuses terres sont restées abandonnées, si de nombreuses terres sont à reconstituer, si nombre d’arbres, laissés sans soin pendant sept ans, sont pratiquement perdus, la bonne récolte fruitière de cette année peut permettre d'accumuler de quoi faire face aux frais de culture de la prochaine récolte. Les autorités algériennes s’efforcent actuellement, au Printemps 1963, de regrouper les maraîchers en coopérative.

Mais le handicap de la dégradation de la structure sociale et de ses conséquences sur la structure agraire crée des difficultés difficilement surmontables : les jardins de Miliana sont devenus en grande partie une compensation de l’incertitude des gains des mineurs. Les conditions actuelles d’exploitation des mines par la Société des Mines du Zaccar, qui a réduit les frais de gestion aux dépens de l’emploi par l’utilisation de techniques déprédatrices pour faire face aux difficultés de marché, ne permet pas au plus grand nombre d’exploitants, réduits à un chômage partiel ou total, d’utiliser des conditions d’irrigation exceptionnellement favorables.

Discussions

 Question de M.Yves LACOSTE --- Est-ce que l’existence de cette masse d’habitat dispersée autour de la ville a empêché la formation de bidonvilles ?

   Réponse --- il n’existe pas à proprement parler de « bidonvilles » autour de Miliana --- pas plus d’ailleurs que dans d’autres villes d’Algérie intérieure. Mais une partie importante de l’habitat semi-rural des ouvriers offre --- avec des ressources d’appoint particulières --- des caractères de dégradation de l’habitat du même type qu’autour de villes sans jardins. De même qu’actuellement une partie des habitants de bidonvilles dans d’autres centres, des mineurs, jusqu’ici refoulés du centre urbain, soit dans les véritables lotissements semi-ruraux des domaines morcelés, soit dans d’étroits logements qu’ils occupaient pour y trouver des loyers moins chers, profitent du départ de la majorité des européens pour trouver en ville des logements accessibles et plus vastes.

 Question de M.Yves LACOSTE --- A qui appartiennent les parcelles inexploitées ?

   Réponse --- Il s’agit pour une bonne part d’exploitations indirectes, plus souvent que directes, de propriétaires non-résidents et disposant d’autres ressources --- notamment d’Européens, pour les domaines étendus --- ; souvent, du reste, l’excentricité de ces domaines a empêché leu exploitation pendant la guerre. Il s’agit également de nombreux microfundia appartenant à des ouvriers qui n’ont pu, cette année, faire les frais de remise en culture et restent en lacune d’irrigation.

 Question de M.Coquery --- N’y a-t-il pas une contradiction entre les exigences du « plein-temps » du travail de huerta et la condition du travail de salarié, même épisodique, de la mine ?

   Réponse --- C’est évident. Aussi bien est-ce une des causes majeures de la dégradation du maraîchage : l’impossibilité, pour les salariés, de payer eux-mêmes les salaires des jardiniers qu’ils seraient obligés d’employer pour mettre leur parcelle en valeur, au moment où la mine a licencié plus de la moitié de ses ouvriers et n’offre aux autres que 24 ou même 16 heures de travail par semaine, apportant un salaire de 6.000 anciens francs environ par quinzaine. M.Coqueret a d’autant plus raison d’insister sur ce point qu’en 1963 près de 15% des mineurs possèdent un peu de terre --- sans compter ceux dont les membres de la famille en possèdent : 80% des familles d’Aïn Bercouq, 75% de celles de Zougala, plus de 50% de celles des autres quartiers ont au moins un peu de terre à exploiter.

Fig.1

Utilisation du sol dans la banlieue de Miliana

Bagf 0004 5322 1963 num 40 316 t1 0014 1

 

Fig.2

Répartition schématique de la propriété dans la partie centrale de la commune de Miliana

 1)

  • a) Limites de l’espace urbain traditionnel.
  • b) Zones d’expansion urbaines organisées depuis la première guerre mondiale.

 2)

  • a) Limite de la zone appropriée de la commune.
  • b) Limite des quartiers.

 3)

  • Propriété de collectivités administratives.

 4) Propriétés européennes de plus de 20 ares à (177 ha) :

a)  Rentiers fonciers et agriculteurs européens : 

  • a) Rentiers fonciers et agriculteurs européens : 
  1. Individuelles
  2. Sociétés
  • b) Id. devenues biens vacants.
  • c) Professions non-agricoles et retraités.
  • d) Vendue à une collectivité administrative.

 5) Propriétés algériennes de plus de 20 ares (à 28 ha) :

  • a) Propriétaires fonciers, agriculteurs ou jardiniers.
  • b) Salarié non-agricole dont : b1 mineurs, b2 autres.
  • c) Professions libérales, fonctionnaires et retraités.
  • d) Commerçants, artisans, industriels.
  • e) Profession inconnue.
  • f) Originaires de zones rurales limitrophes.

 6) Propriétés européennes d’origines diverses (types 4 ci-dessus) rachetées par des particuliers algériens (signe de type 5 superposés).

 7) Lieux de résidence des non-résidents : V. Miliana-Ville. A, Alger.

      R. Régions rurales. U, autres centres urbains.

 8) Propriétés appartenant à des propriétaires résidant dans un autre quartier de Miliana : AB, Aïn Bercouq. H, Hammama. OR, Oued Rihane.

 9) Propriétés de 20 à 10 ares et de moins de 10 ares dont les propriétaires sont :

  • a) De profession agricole.
  • b) Salariés (dont mineurs).
  • c) Commerçants, artisans, fonctionnaires, retraités, membres des professions libérales.
  • d) De profession inconnue.
  • e) Originaires de l’extérieur.

 10) Types correspondants en creux : même propriétés constituées par partage ou achat depuis 1954.

 11) Limité de propriété en majeure partie morcelée récemment.

 

Fig.3

Bagf 0004 5322 1963 num 40 316 t1 0023 1

 

Bagf 0004 5322 1963 num 40 316 t1 0020 1

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