De la légitimité historique à la légitimité populaire

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Le peuple a besoin d’une réponse à sa revendication politique. Les intellectuels attachés au dialogue, au bien commun et à l’apaisement, ne peuvent que prendre acte afin que sa volonté soit respectée. Certes, tout acte politique majeur comporte une part d’utopie et reste toujours un saut vers l’inconnu. La politique n’est pas une science exacte et la réalité est complexe. Mais l’Algérie est mature. 

Le peuple algérien a réhabilité l’initiative politique qui change le cours des événements. Une rupture historique concrète. Terre du juste milieu et du vivre ensemble, à la pointe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, l’Algérie, est face à son destin. Ce n’est pas une crise parmi d’autres. La nation Algérienne affronte le risque, en espérant une solution à la hauteur de la mobilisation. Dans cette épreuve, les mots fierté, respect et détermination reviennent le plus dans l’expression populaire.

Nourri de la culture de la dignité et des valeurs de Novembre, jaloux de sa souveraineté acquise au prix fort et de son attachement à la liberté et à la justice, le pays vit un moment inédit ! C’est la marque de l’algérianité. Depuis le 22 Février les manifestations réenchantent l’histoire nationale. Penser l’événement historique est vital.

Pour le peuple c’est la volonté non seulement de refuser un cinquième mandat, mais de placer le citoyen au centre de la dynamique politique. Ce qui est visé c’est le parachèvement de l’indépendance, en s’exprimant comme source du pouvoir, en renforçant la cohésion nationale et en refondant l’État de droit.

C’est un devenir rêvé, trente années après les premières réformes démocratiques inachevées, par-delà des ombres et des lumières. La jeunesse, que l’on croyait résignée et perdue, fait acte d’un sursaut de vitalité. C’est une demande de réformes politiques profondes, le passage de la légitimité historique à la légitimité populaire.

Le peuple unanime a pris ses responsabilités, pour se repositionner dans le concert des nations modernes, conscient des acquis internes, comme le retour de la paix, et des menaces externes du néocolonianisme. Â partir du mot d’ordre : « Pas de cinquième mandat », il souhaite se réapproprier pacifiquement ses droits politiques.

Il espère que les autorités sauront garantir la transparence et accompagner la phase « transitoire » consensuelle. C’est par la concertation et le débat, sur la base de principes éthiques, de normes juridiques et d’étapes que la divergence politique se réglera, avec au final l’acte électif. Un seul vainqueur : l’Algérie, une et plurielle.

Il s’agit de tourner une page, rajeunir les élites, rationnaliser le mode de gouvernance et réinventer la démocratie toujours perfectible, rempart contre les dérives internes et les ingérences externes. Le choix stratégique d’agir pacifiquement, dépassant les clivages et déjouant les provocations, est fondateur d’une nouvelle ère. Sécurité et liberté, ainsi que critique et respect, peuvent se conjuguer, telle est la vision du peuple, qui ne veut sacrifier aucune de ces dimensions.

Ce sursaut ne peut qu’être entendu par les autorités. Il fait vibrer ceux qui aiment l’Algérie. Personne n’a le monopole de l’amour de la patrie. La vox populi est en train d’écrire l’histoire. Contrairement à d’autres expériences régionales et autres, l’Algérie donne l’exemple en matière de changement pacifique, souverain et respectueux. Elle veut se diriger sans délai vers une cité politique plus juste, sans que l’idéologie biaisée ou la religion instrumentalisée y soient mêlées.

C’est une responsabilité historique collective, dans un contexte mondial chaotique. Soucieuse de rapprochement entre les peuples, exportatrice de solidarité et de paix, l’Algérie ne manque ni de sages, ni de patriotes, ni de compétences, femmes et hommes, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. C’est sa richesse. Personne ne doit être exclu. Ce souffle citoyen pacifique nourrira la culture politique de notre temps, pour ne pas succomber à l’extrémisme populiste et au libéralisme sauvage corrupteur ! C’est la culture du bien commun, de la réconciliation nationale et de l’éveil des consciences, qui prend forme, sous les yeux du monde entier.

  La force de ce mouvement réside principalement dans l’unité du peuple, dans la voie disciplinée de la contestation pacifique, et, par-delà la colère contenue, dans le respect des symboles de la nation. Les autorités elles-mêmes saluent le caractère civique : silmiya et sont fiers de ce peuple. Cela se reflète dans la réaction professionnelle exemplaire des services de sécurité. Le lien fort entre le peuple et l’armée garantit la victoire de toute l’Algérie.

Un socle qui permet une solution viable. Même si l’espoir se mêle à l’inquiétude et que rien n’est donné d’avance, cela portera ses fruits, dans l’ordre, le respect mutuel et la fraternité. Pour préserver l’Algérie, aucune surenchère ne doit entraver le dénouement. De la base au sommet, la sagesse l’emportera.

Un nouveau rapport de confiance entre l’Etat et tous les enfants de l’Algérie, toutes générations confondues, est possible. Le peuple Algérien est conscient de la nature du défi historique, sachant que c’est une œuvre de longue haleine qui vient de s’enclencher. Il ne cesse de se surprendre, de relever les défis et d’étonner le monde. Cette ligne de conduite patriotique, où authenticité et progrès s’articulent, sera enseignée dans les écoles et les universités.

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Par Pr Mustapha CHERIF

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