Articles de algermiliana

  • Rachid Mimouni...Tout l’intérêt d’une « peine à vivre » !

    Quoi de plus symbolique que de réserver un espace à la hauteur de la réputation et des œuvres de qualité de l’auteur dans ce moment précis, coïncidant avec le dix-septième anniversaire de la mort de celui dont tous les titres ont été primés, l’honneur de la tribu en particulier !

    En moins de vingt ans, l’auteur émérite aura écrit toute une dizaine de titres de mérite, dont la résonance de leur contenu porte plus loin que le territoire de son pays de naissance tant le style  en « va-et-vient » épouse par moment « cette écriture en spirale » propre à Kateb Yacine dont il s’en est inspiré à merveille et qui séduit et conduit tout droit le lecteur à coller de tout son esprit et attention au texte souvent bien succulent et très singulier.Une peine à vivre

    Soit en moyenne un ouvrage tous les deux années d’écriture besogneuse, tel que le dicte cette religion musulmane en référence à l’espacement des naissances engagé  dans le cadre du planning naturel relatif à la science de l’accroissement démographique.

    Oui ! Les livres font également partie de cette progéniture laquelle, avant de rendre hommage à leur famille, propage au loin et durant de longues générations le savoir dans toute sa dimension et profondes qualités humaines.

    Mieux encore, ils sont ces fils qui ne demanderont, ni même jamais n’exigeront leur part à un quelconque héritage parental, rendant immortelles les idées de leur créateur et étreignant éternellement la grande stature de leur maitre, le rendant présent à tout instant.

    Le savoir ne conduit-il pas, pour l’occasion, à l’immortalité du Savant, du bon conteur et de l’érudit poète-rossignol ?

    Oui ! Il s’agit bel et bien du conteur et du rossignol, parce que la prose de Rachid Mimouni est composée de ces deux styles et formes d’expression cursive, tissés dans la même trame et brassés dans le même moule ou texte littéraire : celui qui ressuscite ce goût à la lecture des récits d’autrefois et de ces projections d’avenir, encore d’actualité.

    Ce parallèle s’impose donc grâce à la magie des mots de l’auteur, puisque tous ses ouvrages, tels des vers sonnant encore grâce à l’apport conséquent de la force et puissance de leur rythme et tonalité, ont été primés.

    Ils sont donc aussi considérés tels  ses propres fils. Parmi les plus érudits et ceux très intelligents qui soient ! Eux aussi font honneur à la famille ! Bien plus que cela, ils le font de fort belle manière et pour toute l’Algérie, leur unique et véritable patrie !

    Rachid Mimouni est donc cette plume multifonctionnelle qui trouve cette aisance à faire pâlir de jalousie ses semblables, puisqu’elle sait passer allègrement de ce style cocasse et très tenace à celui fin et très raffiné pour décrire ces scènes de la vie où se mêlent sans discernement et sans la moindre retenue l’amour, la sexualité, la dictature, le terrorisme, la hogra, la harga, la bureaucratie et tant d’autres maux sociaux qui constituent cette plaie sociale de l’Algérie des années deux mille.

    Dans son style, il est incomparable tant ses parades et nombreuses escapades sont imparables, bien superbes et très subtiles. Souvent très utiles pour ces jeunes plumes qui cherchent à faire dans cette façon bien singulière sinon osée de narrer des évènements ou de raconter des récits dans ce bel art cursif de communiquer, avec beaucoup d’aisance et énormément de plaisir pour ces faces cachées de la vie en société.

    Le choix de ses titres est déjà en soi une « invite express à leur lecture ». Et dès les premières lignes, c’est le lecteur qui s’y accroche ! Etait-il à ce point persuadé et si convaincu que c’est le titre de l’ouvrage qui accroche, sinon de lui-même le lecteur, vraiment dégoûté, décroche ?

    En vérité, ni ses titres ni leurs contenus n’ont été en deçà des attentes de ce public qui connaissait déjà depuis le début des années soixante-dix la valeur réelle de « l’enfant du pays », et davantage avec cet « honneur de la tribu » dont il n’aura lésiné sur aucun moyen pour habilement le défendre, sinon farouchement le recouvrer.

    A l’instar d’autres matheux comme Tahar Djaout, Anouar Benmalek et autres encore, Rachid Mimouni était donc happé par la magie des mots pour léguer à l’histoire les chiffres et leur exercice fastidieux.

    Dans ce choix bien difficile, ce sont ces sciences exactes qui lui traceront sa carrière professionnelle pour être par la suite relayées par cette littérature de charme qui embarqua l’homme sur ce terrain magique des belles-lettres, celles qui le feront connaitre plus tard bien au-delà des murs algériens.

    Ces chiffres-là lui auront probablement appris toute cette rigueur dans l’analyse des faits et évènements dont les lettres se chargeront tout à l’heure de leur bonne expression et magnifique traduction dans ce décor fascinant à plus d’un titre.

    Il est parfois des choix ainsi faits. Et celui effectué par Rachid Mimouni à un moment crucial de sa vie a toujours été guidé par cet amour pour les lettres (bien souvent magiques) qui aura eu en fin de compte bien raison de ces chiffres immuables et par trop conventionnels.

    A-t-il été très tôt inspiré ou admirablement séduit par un quelconque auteur classique  pour le suivre plus tard à la « lettre » et au pas de charge sans se soucier de l’heure qu’il était, ni même de consulter « ces chiffres » que lui indiquait le cadrant de sa montre ?

    Loin de ces chiffres assez fastidieux dans leur assemblage et expression, l’heure n’était-elle pas à ces joutes littéraires qui faisaient voyager l’être humain bien loin dans ses rêves les plus fous et les plus improbables ?

    Pourtant à en croire l’auteur : « La mathématique est la seule véritable science. Tout le reste n’est que fioritures, ensemble de règles et de préceptes destinés à masquer un vide essentiel et surtout à décourager les amateurs. En mathématiques, les règles sont claires et connues à l’avance. C’est le seul exemple de vraie démocratie* ».

    Rachid Mimouni était donc ce « fils du pauvre »  semblable à celui décrit des années plus tôt par Mouloud Feraoun. Sa venue à la littérature, il la doit à son père, analphabète de son état, qui l’inscrivit à l’école française dès le début des années soixante du siècle dernier. Il venait d’un autre monde et ne disposait d’aucun livre chez lui.

    Il était bien différent de ses semblables nommées Assia Djebbar, Maissa Bey, Ahlem Mostaghanemi et autres auteurs algériens qui ouvrèrent les yeux sur de véritables bibliothèques familiales appartenant à leurs géniteurs. Ce n’est d’ailleurs qu’en classe de 4ème qu’il s’intéressa à la littérature française en ayant eu à lire « le grand Meaulnes », œuvre qui le fascina et le consigna dans ces longues séances de lecture.

    Ce fils du pauvre vivra dans la pauvreté pour mettre à profit ces moments de misère qui allèrent magistralement le propulser au sein de ce cercle très restreint des meilleures plumes du pays et du Maghreb.

    Dans une « peine à vivre », l’auteur de la « Malédiction » fait ce « diagnostic clinique de la dictature dans le monde ». Il y décrit alors toute « cette peine à vivre » d’un peuple supportant très mal  l’excès de zèle du tyran qui gouverne le pays d’une main de fer, au sein de ce parti unique grâce à ces méthodes iniques et peu pratiques alors en vigueur.

    Il symbolise le dictateur à travers la panse de Idi Amin Dada, les insomnies de Staline, la moustache de Boumediene, les grossièretés en intimité de Hafidh El Assad, l’extravagance de Mouammar El Kadhafi et le regard trop méchant de Saddam Hussein. Tous ces présidents de fausses républiques incarnaient chacun à sa façon le dictateur de leur pays, que décrit Rachid Mimouni en appropriant au sien tous ces qualificatifs pour brouiller les pistes à celui qui cherche à s’y identifier grâce à quelques menus indices ou détails par trop insuffisants et peu consistants, glanés çà et là dans le texte de l’auteur.

    Et c’est à la mesure des privilèges et à la hauteur des pouvoirs dont dispose le dictateur qu’il élève, lui, le sien et lui confère ce droit absolu de disposer de ses pauvres gouvernés comme de leur existence ou subite disparition et exécution sommaire ou sur le champ.

    Rachid Mimouni utilisait à la perfection ce style de la rupture, du reste peu connu sinon totalement méconnu à cette date aux plumes Maghrébines, pour dénoncer ces pratiques en usage contre lesquelles s’élevait la morale citoyenne, aggravant de jour en jour la pauvreté de la basse société et enrichissant à l’extrême ces repus administrateurs de l’état.

    Chez lui le style est très critique, semblable à la marque de l’impact d’un vrai stylet ; le verbe assez sec tel un claquement de fouet. Ses phrases sont tantôt très serrées et déballées dans cette spirale infinie et à la vitesse vertigineuse d’un sprinteur à l’approche de sa ligne d’arrivée, tantôt bien aérées, peu acérées et très espacées, exprimant ces images de contes de fées difficilement imaginables sans ce talent hors pair de celui qui les décrit si promptement.

    Avec Rachid Mimouni, quelque soit la tragédie rapportée ou le malaise raconté, on est comme embarqué dans ce territoire de merveilles où les phrases parlent d’elles-mêmes, exprimant ces métaphores haut de gamme qui emportent le lecteur aussi loin que le mène les rêves les plus fous que seule la littérature de choix et de mérite est à même de susciter ou d’improviser.

    Dans « une peine à vivre », Rachid Mimouni s’attaque à ces dictateurs dans le monde sans les nommer, prétextant que le sien habite ce pays sans nom ! Ce que d’ailleurs anonymat oblige, plume rédige, texte fustige et sécurité exige… !

    Peut-être y cherchait-il après cette impossible « paix à vivre » pour ces éternels damnés de la terre ou de la mer ?

    Lire la suite

  • Une beauté naturelle, éternelle… !


    À Tipasa, tôt le matin, et quelque soit la saison de l’année, l’azur du ciel se confond profondément avec l’autre couleur bleue de la mer. Juste une question de nuance dans le bleu qui s’efface à mesure que le temps passe et que le jour se lève de bon pied, en quittant ses vieilles hardes et très anciennes guenilles.
    Ici, tout près de la côte Méditerranéenne, cette lune de miel est naturelle ! Bien éternelle … ! Et chaque jour, elle se renouvelle ! Dans cette partie durable d’amour charnel et tout à fait naturel, le ciel se couche sur la mer. Il le fait de tout son poids et corps immense et compact, dégageant par moment le souffle de sa transpiration que la nature physique et celle humaine le subit de front et en profondeur dans sa propre chair.
    Et seul au loin, un trait très fin couvert d’un bleu plus nuancé marque le territoire de chacun des deux partenaires, tantôt en action, tantôt dans leur état de décontraction. En plein milieu du ciel, le soleil de plomb qui darde ses rayons sur la région, du lever du jour jusqu’à son crépuscule, avec la même ardeur et le même souffle permanent et effréné de sa puissante chaleur et même force de frappe qu’autrefois et de tous les jours, laisse à penser qu’il tente de tout son poids de les séparer, par moment, l’un de l’autre.
    Juste pour leur permettre de reprendre leur souffle et de plus tard revenir en force à leur grosse bise sans cesse répétée.
    Avec le même refrain, le même rituel et la même folie d’amour. Avec cette même folie d’amour de retrouver au plus tard l’autre. Le partenaire. Ce partenaire naturel. Cette joie commune de partager avec lui les grands moments de plaisirs et de vrais désirs, bien affichés et longtemps manifestés envers l’autre sexe, sans lequel cette joie formidable n’aurait plus aucun sens !
    A l’horizon, en pleine lumière du jour, le bleu céleste épouse donc celui bien marin.
    Les écumes des vagues confondues avec ces nuages qui ratissent assez bas, au loin, les aspergent de cette brume matinale, comme pour leur annoncer le lever du jour imminent.
    Le couple s’accouple dans son grand lit naturel, lequel tantôt berce son monde grâce à la beauté naturelle de son merveilleux décor et tantôt lui envoie ces fournées ininterrompues de chaleur de plomb qui les maintiennent cloués à l’intérieur même de leurs demeures.
    Tarés et bien terrés pour un temps, parfois assez long ! Souvent c’est le temps que durera toute cette saison chaude et caniculaire. Très difficile à vivre, somme toute ! Dès la tombée de la nuit, faite de bleu et de blanc baignant dans le gris, des nuages venus en série et se
    bousculant à l’horizon, rentrant à leur bergerie, le couple habillé le jour du bleu de l’espoir se voila soudainement la face.
    Et dès le crépuscule annoncé, ils tombent tous les deux dans les bras de Morphée, emportés par leur sommeil éperdu, les yeux bien écarquillés sur le lever du jour du lendemain qui tarde à se manifester.
    A ce moment-là, la mer et le ciel s’envolent dans leur rêve de l’intimité, convoler en justes noces, et bien loin des regards plutôt indiscrets de ces êtres humains restés médusés et circonspects devant le déploiement acharné de tant d’ombres épaisses et trop sombres que distille par doses saccadées l’arrivée impromptue et inévitable de la nuit, montée sur ses grands chevaux pour venir juste pour un temps leur tenir bonne compagnie.
    Tipasa respire à longueur d’année la fraicheur de ses champs verdoyants et chatoyants, venant à tour de rôle se jeter dans la mer, fuyant par moment cette chaleur suffocante sévissant en été dans la contrée.
    Ici, pendant le jour, l’été ou l’hiver, au printemps comme en automne, Tipasa, durant presque tous les jours de l’année, porte le même costume que la veille et qu’autrefois.
    Celui donc taillé sur mesure par cette nature généreuse et féconde assistée de ce temps radieux et souvent bien ensoleillé, foisonnant et faisant miroiter au loin et à dessein ce merveilleux bleu où espoir et espérance se conjuguent et se confondent juste pour pleinement profiter de la beauté paradisiaque des lieux et du temps printanier qui y règne presque durant toute l’année.
    Tipasa, la Romaine, garde de l’histoire ancienne de la région un bon bout sinon la bonne clef qui permet cet accès facile et bien discret aux fins fonds de ses profonds secrets dont les seuls vestiges en bordure de mer ou le mausolée de Hélène de Séléné, reine de Maurétanie, juchée plus loin et en haut de la colline qui la surplombe, tentent de vainement la replacer dans son contexte historique d’autrefois.
    Se situant dans le prolongement de la colline qui prend naissance du côté de Koléa à l’est pour échouer à l’ouest aux abords de la plaine de Hadjout, ce dôme géant, pierreux et très rocailleux, puissant et très imposant par sa stature et sa carrure, fait face à l’imposant Mont du Chréa jusqu’à nous paraitre comme le taquiner à distance.
    Koléa qui a tout le temps peur que le Mont Chréa lui tombe dessus ou sur la tète, selon l’anecdote racontée à son sujet, semble être très bien protégée par ce mausolée, se tenant debout et défiant le temps en très solide et véritable sentinelle, juste pour bien protéger la ville de l’osier et des généreux gosiers du chant « chaabi d’antan » contre les dangers de la nature.

    Lire la suite

  • De l’art graphique d’une culture prolifique

     

    Pour une surprise, c’en est une ! Et de taille celle-là ! Au hasard d’une promenade improvisée, je rencontrai l’auteur Mustapha Lotfi El Manfalouti, des décennies après sa mort. C’est en enjambant la Seine algéroise (l’Oued El Harrach, en l’occurrence), empruntant le pont piétonnier que son regard trop caricatural fixa le mien.

    Surpris de trouver l’ouvrage en ce piteux état qui lui servait de tribune chez un misérable bouquiniste d’occasion, je réussis non moins habilement à subtiliser le «livre d’or» à son bourreau du jour, lequel ne connaissait que très vaguement la renommée de l’auteur ainsi que la valeur ô combien précieuse du titre considéré. Lui payant, en échange, cette modique dime en dinars symboliques afin de libérer le «prévenu». Il ne s’agissait pourtant guère de l’aîné des trois chefs-d’œuvre d’El «Ennadharat». Ce fut tout juste le cadet, connu à travers ce tome II, écrit en langue arabe, bien évidemment. Tout allègrement, je prenais donc, flegmatique, possession de ce «trésor littéraire» trainant par terre au milieu de cette boue qui surplombe et accompagne l’odeur puante et nauséabonde du fleuve qui lui tenait de cadre de jardin de présentation.

    D’un geste machinal, je payais la caution -misérable rançon- pour obtenir libération de l’œuvre de renom, en tendant une seule pièce de monnaie à ce garde-chiourme calfeutré dans son manteau et ignorance. Mustapha Lotfi El ManfaloutiL’acte se réalisa donc au rabais de son prix public ou légal. D’ailleurs, les quelques pages feuilletées à la sauvette sous le regard vigilant du bouquiniste-kidnappeur ont suffi à me décider à acheter le livre proposé à la vente et exposé à même le sol, me demandant comment un tel numéro, unique en son genre, eut pu échapper au regard pourtant fouineur de ces «chasseurs de primes littéraires», peu nombreux certes à s’y aventurer à cette heure précise ? Nombreux étaient au contraire les passants, pressés de prendre le bus ou le train, en attendant les premiers essais du métro, mais étant en majorité des étudiants traversant en coup de vent le pont reliant l’université à leur demeure parentale. L’ouvrage était un vieux bouquin aux feuilles bien jaunies par l’effet du temps et tant de misère endurée ou subie dans la chair.

    Celles-ci sentaient l’humidité du papier mêlée à l’odeur du renfermé, avec en surface une bonne couche de poussière crasseuse pour tout caricaturer de l’état déliquescent de véritable relique dans lequel il se trouvait. Il symbolisait, en fait, ce savoir abandonné par ces commerçants courant derrière le lucre de la vie et ce dinar à gagner dessus ! Edité par la maison de la culture de Beyrouth (Liban), probablement bien avant la première moitié du siècle dernier, celui-ci ouvre, sans la moindre introduction, sur un texte titré de «El Bayan» (avis, communiqué…) évoquant le traitement du courrier provenant des citoyens par un ministre de la République que commente superbement l’auteur dans un arabe classique bien caustique.

    Le vocabulaire qui y est employé procède de cette manière osée et très subtile de faire dans le style de l’opposition et de la transposition des expressions et qualificatifs de sens contradictoires, donnant toute sa dimension à cette belle métaphore, réalisée avec beaucoup d’aisance et d’à propos. Une approche bien singulière, sans laquelle le style de l’auteur aurait préché par manque de beauté, ne faisant par conséquent que rétrécir son champ de l’imagination et occultant le reflet de ces images magiques volées à cette fiction de haut vol. Riche de quelques quarante-six titres ou thèmes, l’ouvrage en question traite de sujets différents, mais assez cohérents et très puissants, poussant l’auteur à puiser ses mots symboliques et ses expressions magnifiques et mélodieuses dans ce volumineux répertoire et grand vivier de la langue arabe à la musicalité «chantonnante» et vraiment attachante, rythmée à cette forte tonalité et grande fonctionnalité qui en fait d’elle une langue très prisée et ses textes de qualité hautement confirmée.

    L’acte d’achat contracté, le sourire aux lèvres, je refermais l’ouvrage brièvement ausculté. Assuré d’avoir réalisé une bonne affaire, je le rangeai dans ma sacoche et repartis tout de go flairer une quelconque opportunité le long du pont avant de me retrouver chez moi en fin d’après-midi, rouvrant de nouveau mon «trésor» acquis au dixième de son prix et au dinar symbolique de sa valeur nominale, vénale et culturelle. Je  feuilletai, ivre de joie, de nouveau ses pages, folio après folio, voyageant de surprise en surprise, au cœur de ses formidables secrets et au sein de cet univers où la magie des mots prend, grâce à ses expressions justes et honnêtes, le dessus sur cette monotone vie qui nous est servie et tout le temps livrée sous toutes ses différentes facettes et nombreux aspects.

    De prime abord, plusieurs chroniques et autres textes de référence mondiale contenus dans l’ouvrage m’intéressèrent. Et à mesure que j’avalai la première, je dévalai aussitôt cette pente qui me mena tout droit au second écrit. Je le fis sans halte, sans la moindre pause ou récréation, très conscient d’y avoir trouvé ce filon littéraire qui allait me faire découvrir à nouveau ces textes très prisés dont leur connaissance et familiarité remontaient à l’époque de mon enfance ou tendre adolescence. Je me régalai, me rassasiant de ces belles paroles couchées noir sur blanc sur de vieux papier, tenant difficilement le coup, défiant le temps, pour rester éternelles, immortelles…

    Depuis, c’est du contenu bien précieux et très riche de ma «boîte à merveilles» que je cueille chaque matin mes belles et parfumées fleurs avant même que je n’aille retrouver mon travail. L’embaume de leur parfum du terroir et assez rare, me procure ce bonheur du jour et bien coutumier, sans cesse renouvelé. Je me plaisais à parfois sans relâche ressasser certaines d’entre elles, succulentes à souhait et instructives à l’évidence. De nombreuses réflexions y sont consignées et dont leur analyse reste d’actualité, leur finalité de bonne raison et la charpente du texte ayant servi à leur expression tout aussi puissante et bien convaincante.

    Cependant, l’ouvrage s’illustre par cette singularité à aborder ces thèmes «inédits», traités à leur époque par cet érudit de l’art cursif d’expression arabophone dont le style se confond à merveille et en profondeur avec celui de cheikh El Bachir El Ibrahimi et s’apparente par endroits et à bien des égards à celui de l’autre référence et imminence grise littéraire ayant pour adresse cursive Taha Hussein. Mais, à mon humble avis, l’œuvre de Mustapha Lotfi El Manfalouti se situe bel et bien un cran au-dessus de celle de ses semblables et plumes comparables. A travers ses œuvres, il nous rappelle à la fois ce français de Guy De Maupassant et cet Algérien de Bachir El Ibrahimi, cet écrivain arabe dont les styles sont «jumeaux».

    L’étendue de son espace culturel lui confère cette haute capacité de juger de «ces autres compétences» en investissant haut la main cet «espace intime» propre aux autres langues et «espèces littéraires» ; et il n’est point étonnant de découvrir chez cet auteur des thèmes abordant d’autres cultures révélant au passage des grands portraits de ces magnifiques plumes et autres érudits de la littérature universelle. A ce propos, l’ouvrage en question nous en refile quelques noms pelotonnés sous ces titres de «l’oraison funèbre de Voltaire» (taabin Voltaire), «A Tolstoi» (Ila Tolstoi) à côté de «Quatrins de Omar El Khayyam» (Robaiyyat El Khayyam). Bien que touchant à divers domaines, l’ouvrage se focalise essentiellement autour de la culture et de la littérature.

    Des sujets comme «Traîtrise des titres» (Khidaa El Anaouin), «Voyage dans un livre» (Siyaha Fi Kitab), «Des larmes pour la littérature» (Damaa aala El Adab) sont très intéressants à connaître de leur précieux contenu, beauté littéraire et haute portée culturelle. En fait, ses regards sont des «regards croisés» sur cette culture universelle qu’emprunte ses textes littéraires qui font à chaque fois référence à ces génies de la plume dont Victor Hugo et l’oraison funèbre fracassante qu’il avait prononcée à l’occasion du décès de Voltaire, traduite vers l’arabe pour la circonstance près d’un siècle après la mort du défunt héros de la littérature française et principal animateur du siècle des Lumières. Hugo est donc plusieurs fois cité dans ses œuvres et écrits, lui louant, au passage, son langage juste, sa réflexion féconde, ses mots fouillés, ses phrases ciselées, ses vers bien mûrs et ses textes succulents à souhait. El Manfalouti n’est-il pas, en définitive, cette exception qui justifie la règle ? Celle de l’universalité de la littérature…!

  • Mon meilleur cadeau

    Nous sommes le 31 mars 2014, à quelques heures seulement d’un tout autre 1er avril, celui de l’année en cours, bien évidemment. Mon portable se trémousse un instant, puis retentit, bruyant, sans discontinuité, distillant son refrain de musique coutumier. Le temps de me préparer à aller prendre l’appel, puisque me trouvant encore occupé un peu plus loin dans l’autre pièce de l’appartement, que celui-ci se tait à nouveau, avant de reprendre encore de plus belle.

    Lire la suite

  • La vache suisse et le pétrole arabe

     

    La vache est pour la Suisse ce que le brut est pour tous les Arabes. A chacun d'eux sa propre richesse. D'où découle d'ailleurs l'essentiel de son économie. A chacun donc son métier et les vaches seront certainement bien gardées, dit la sagesse.

    Pour l'instant, leurs maitres incontestables ce sont donc les Suisses. Puisque les arabes, eux, s'intéressent toujours et sans vergogne au pétrole. Les vaches Suisses ont depuis longtemps envahi les guichets de l'état civil helvétique. Leur recensement les évalue à présent au nombre de six cents mille bêtes. Toutes domestiques ! Toutes minutieusement identifiées. Et toutes détentrices d'un passeport national et d'un autre, le cas échéant, de type international, commun à toutes les bêtes du monde, en cas de voyage au-delà des frontières de ce petit, beau et tranquille pays.

    Ce que pourtant l'on refuse manifestement à certains êtres humains des pays arabes (le cas typique de cette minorité du Koweït, en l'occurrence !) est donc devenu un droit indéniable ou absolu accordé à ces bien heureuses vaches Suisses.

    Ces bêtes-là –sans distinction de race ou d'espèce bovine- voyagent toutes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ce tout petit pays helvétique, munies de documents identitaires très officiels : le titre de voyage local pour l'une ou le passeport international pour l'autre.

    Dans ce pays de la technique de précision, tout est donc bel et bien réglé à l'avance comme les aiguilles d'une montre qui marque l'impact indélébile du temps qui s'écoule ou celui qui manifestement nous écule.

    Les vaches Suisses, sans être confondues dans le rôle de ces bêtes à la stature très religieuses de l'Inde, jouissent toutes et sans exception de ce haut standing et statut très relevé, tout ou très proche de celui purement humain.

    A l'image du pétrole Arabe, elle est donc exportable. Seulement l'économie de ce petit pays au haut et très grand relief en dépend dans une très large mesure. Raison pour laquelle on n'en exporte pratiquement que l'excédent de son cheptel ou de son produit laitier et autre dérivé fromager. Sur les crêtes et autres nichés valons de ces hautes Alpes, le citoyen Suisse tient encore et toujours à sa vache, tout comme d'ailleurs cet Arabe qui s'accroche mordicus ou pour de bon à son baril de pétrole. Le premier cherche à vivre comme toujours des généreuses mamelles de son animal domestique pendant que le second pompe toujours ce précieux liquide de sa considérable énergie fossile.

    Cependant, ce paysan des Alpages se dépense comme un nègre pour entretenir son animal et bovin laitier à l'inverse de ce bédouin Arabe qui pille et extirpe à longueur de temps ces indéniables richesses souterraines non renouvelables de son pays, afin de réchauffer avec cet occident qui grelotte de froid pendant la saison hivernale, moyennant ce gros pognon que draine cette grande énergie.

    A l'animal domestique très généreux du premier correspond donc, de l'autre côté, ce très riche désert Arabe. Et pendant que celui-ci donne à manger à sa bête domestique, celui-là aspire et tire tout le temps et sans la moindre réserve sur les mamelles de cette très féconde terre Arabe, sans avoir à lui apporter la moindre contrepartie en matière d'effort physique, hormis celui de l'en déchoir de ses richesses fossiles.

    C'est donc là où réside toute la grande différence au plan de la philosophie de la vie entre ces deux mondes, jugés bien distincts ou très éloignés l'un de l'autre.

    Sans leur pétrole, tous les pays Arabes seraient, sans nul doute, déjà des nations très pauvres ou des pays mort-nés.

    Nantie seulement de quelques villes de moyenne dimension comme Genève, Zurich, Bâle et quelques alpages en haute montagne, la toute minuscule Suisse arrive tout de même à bien se placer et durablement s'installer devant de bien immenses pays-continents comme l'Algérie, tenant surtout la dragée haute à de très grandes puissances économiques mondiales.

    Et si ce petit pays helvétique est plutôt connu au travers de ses magnifiques montres qui régulent depuis des lustres déjà ce temps propre à toute l'humanité, il l'est également ou tout autant -sinon bien mieux considéré- au regard de l'élevage de son cheptel bovin laitier qui produit ce chocolat Suisse de grande qualité.

    En dehors de sa neutralité politique avérée et de la grande assurance reconnue à ses banques, très anciennes et bien pérennes, la Suisse demeure ce grand symbole de l'usage du temps, tenant compte de cette grande précision dont elle garde si jalousement encore la bonne recette et qui défie la puissance astronomique des grandes nations du monde dans des domaines plus complexes et les mieux considérés.

    Ce tout petit pays ne prétend jamais voir plus grand que son propre horizon. Il se contente seulement de ne rien ignorer ou mal considérer de ce qu'il voit ou entrevoit comme solution durable et acceptable en tout point de vue, à ses propres problèmes, dans la perspective de hisser davantage ce très haut relief parmi les nations les plus considérées de par le monde.

    Depuis déjà très longtemps, la Suisse se maintient à ce statut enviable et très considérable de pays très tranquille, bien neutre, surtout très propre, et où il fait toujours bon vivre, malgré ses vents violents, ses interminables chutes de neige hivernale, ses pluies diluviennes, son cloisonnement et parfois même son obtus raisonnement.

    Ainsi, la vache Suisse, pilier essentiel et donnée pérenne de l'économie helvétique, assure toujours une vie décente, heureuse et très colorée à ce peuple de montagnards et de très fiers campagnards, connus tous pour leur grande fierté et indéfectible dignité. C'est –surtout- grâce à cela que la Suisse, chaque jour qui passe, avance d'un cran dans le concert des grandes sociétés et toutes développées nations. Son économie est des plus simples, sa recette-miracle des plus modestes encore.

    Mais à la clef, il existe tout de même ce besoin impératif de conquérir ces hypothétiques espaces laissés entre-temps libres dont le grand profit scientifique ne peut être que des plus bénéfiques pour le futur de la nation et l'économie de la contrée.

    Voilà donc maintenant vite refermée cette grande parenthèse consacrée à ce tout petit pays du vieux continent. Retenons, tout de même, que cette généreuse vache helvétique, encore bien gardée par ses pâtres des hautes Alpes, donne encore et toujours beaucoup de lait à plus de six millions d'habitants Suisses ainsi qu' à bien d'autres nations qui en sont dépourvues.

    Elle demeure au cœur même de cette facile mais durable équation de l'économie helvétique dont elle en constitue d'ailleurs la donnée de base ou essentielle. Plutôt celle fondamentale et bien capitale.

    A l'opposé, qu'en est-il de ce brut arabe ?

    Tous les indicateurs montrent, à l'évidence, qu'il reste encore cette ‘'vache Arabe''. Celle qui leur fournira toujours du lait sans pour autant leur exiger en contrepartie la moindre botte de foin ou une quelconque ration de son en vrac ou cubé.

    Quant à leur exiger du trèfle ou de la luzerne, c'est plutôt leur demander l'impossible au vu de toutes ces conditions climatiques très défavorables à la prolifération d'un tel aliment de bétail, pourtant très prisé pour les ruminants producteurs de lait frais.

    Ainsi, ils obtiennent tous de cette terre pourtant aride et bien nue du lait à profusion, accompagné le plus souvent de toute la gamme variée de ses nombreux dérivés, gratuitement et sans faire un quelconque effort, hormis celui obligatoire de l'aspirer, à longueur de journée et sans discontinuité, les pieds dans l’eau, à partir de leur retraite dorée ou demeure huppée, de ses mamelles tentaculaires et qui leur arrive jusqu'au pied de leur lit, sortant en courant des fins fonds des entrailles de ce généreux sous-sol.

    Seulement, à l'inverse de ce gentil et très éduqué peuple helvétique, chez les Arabes, ce sont toujours les mêmes personnes ou familles politiques qui tiennent encore entre leurs mains ces pis pulpeux et juteux d'où jaillit ce merveilleux produit (liquide) de la terre qui arrive à concurrencer tous les autres liquides réunis ou combinés à eux-mêmes. Disposer en permanence d'une telle vache, laquelle produit, en plus, ce liquide qui coule à flots au sein des entrailles de la terre Arabe n'est pas de nature à les réveiller de très tôt de leur profond sommeil pour se préparer à aller travailler.

    Ils auront tous appris à longtemps vivre de cette indéniable ou supposée intarissable rente qui leur épargne même de réfléchir un jour aux grandes difficultés de la vie.

    Pour preuve, munis de tout leur gros pognon qui ne profite qu'aux banques de l'occident, ils restent tous, bien incapables de créer le moindre produit industriel ou réflexion scientifique bien féconde ou très pratique dans le quotidien de leur vie.

    Ils sont donc bons pour tout juste consommer ce que l'Occident, depuis toujours, ou l'Asie, à présent, ne cessent de produire pour eux en quantités industrielles.

    Une donnée économique donc très naturelle dont les lois de l'économie elles-mêmes réfutent, récusent et refusent de l'associer à un quelconque raisonnement futuriste et salutaire pour toutes ces nations Arabes qui vivent l'attentisme comme une fatalité. Sinon telle une très grande qualité au vu de ces grandes découvertes du brut qui voient le jour ça et là au sein de ce grand Sahara Arabe. Et l'on arrive donc finalement ou bien fatalement à cette conclusion plutôt terrible du moment : puisque la seule vache Suisse défie tout le brut des Arabes ! Il n'y a qu'à consulter pour cela le classement mondial des nations pour s’apercevoir de cette différence terrible qui existe entre l’esprit qui guide cet animal et celui en  vigueur au sein de tout cet immense désert Arabe !

  • Le livre, ses sous et ses dessous !

    Separateur noir 700px

     A coup de feuillets effeuillés, il se déclame.  Parfois, il se réclame ! Nonobstant le fait qu’il a une âme et qu’il clame qu’il calme ce désir de divertir, au travers des merveilles des mots qu’il suscite, produisant du bonheur et de la joie au lecteur qui le consulte ou l’ausculte, il crée, souvent, cette extase, qui met ce dernier en phase avec son contenu, pour vraiment bien apprécier son quotidien menu.

    Il est cet éternel compagnon, enveloppé dans des jolis fanions et très beaux rubans, qui ne dit jamais non à son farouche opposant au plan des idées qu’il distille et analyse avec une très grande rigueur, dextérité et bonne maitrise des mots utilisés et, par extension, des  sujets abordés, puisque toujours assuré de le convaincre sans grande peine et sans avoir à le bousculer ou à vraiment l’influencer bien autrement.

    Il est chargé de transmettre de génération en génération ce très lourd fardeau et riche trésor que constitue le Savoir dans toute l’étendue de ses définitions, notions, motions, mentions, émotions et grande dimension.

    Ecrit d’une main de Maitre, il contient en son sein le génie de ces superbes plumes qui hument à la volée la belle parole et le sens de l’implacable conviction au travers juste des mots qui chantent et des phrases qui enchantent, grâce à leur musicalité, très forte tonalité,  légendaire utilité et très grande fertilité.

    Il fait honneur à celui qui peine vraiment à lui donner vie et une très juste existence jusqu’à lui assurer, en retour, et sans tarder, cette postérité séculaire longtemps partagée par les citoyens de tous bords et de tous les continents.

    Dans la peau d’un enfant authentique, emblématique, charismatique et très « classique », il sait  tout faire pour toujours plaire à la fois à son Grand Maitre et à ses nombreux lecteurs, tous pressés de le débusquer et de le provoquer d’un regard effaré et inquiet ou de complètement le dénuder jusqu’à toucher du doigt aux parties intimes du corps des sujets parfois brillamment traités et mis en valeur.

    En enfant de bonne famille, il sacralise ce principe de ne jamais, plus tard et une fois bien majeur, lui demander (exiger) sa part à un quelconque héritage sauf celui purement biologique, étant très persuadé qu’il constituera lui-même à travers le temps et les futures générations cet autre héritage culturel inestimable qui profitera à toute l’humanité, sans distinction de race, de territoire et de religion.

    Seulement, puisque souvent né sous cet autre toit de la famille hospitalière de « Madame la rotative » où il y aura à faire ses premiers pas et y grandir en futé produit intellectuel sous le

    statut et dans la forme d’un vrai pensionnat, il y restera très fidèle, ne sachant par conséquent qui choisir finalement entre sa mère biologique et naturelle  et celle d’adoption.

    Produit de la grande famille de la belle, riche, envoûtante et succulente littérature, il tachera -sa vie durant- à ne jamais s’écarter de produire ce Savoir et cette formidable connaissance lesquels non seulement unissent entre elles ces deux dernières familles, mais aussi celles-ci au reste de toutes les familles du monde entier.

    Dans son légendaire dictionnaire, il aura depuis sa naissance à jamais banni de son étoffé dictionnaire cette censure de l’information ou autre hypocrisie qui met en doute sa fidélité envers ses nombreux lecteurs, tous considérés sur un pied d’égalité et tous charmés par ce désir immense de le consulter à tout moment, et autant de fois que leur besoin  se fait vraiment sentir.

    Très soucieux de la perfection à toujours apporter à son art d’exister qu’il réalise par ailleurs avec un grand amour du métier, il ne néglige jamais le moindre  détail de nature à mieux faire percevoir les choses de la vie, sinon à bien expliquer les sujets qu’il traite profondément et très minutieusement dans leur ensemble, globalité et grande variété.

    A sa toute hâtive consultation, il répond debout, ouvert et présent pour dire vrai justement, mais aussi pour produire séance tenante ou sur le champ cette utile information demandée, accompagnée de ses sources documentaires ainsi que ses différentes interprétations et autres sens donnés à l’expression usitée.

    Raison pour laquelle tout le monde lui accorde cette grande importance jusqu’à bien souvent lui consacrer de très prestigieux salons, de cycliques foires, de très relevés forums où se rencontrent et se croisent le fer les plus belles plumes de la planète.

    A vol d’oiseau, il parcourt à grandes enjambées ou ininterrompues navettes l’immense  planète et son très grand territoire, qu’il visite dans tous les sens et directions, bravant en véritable champion le mauvais temps et autres barrières naturelles et psychologiques, apportant à l’humanité de la lumière dans les idées mais aussi cette nécessaire dose d’espoir qui donne vie à ses nombreux consultants.

    Rompu aux grands idéaux des peuples et nations aspirant à leur indépendance que consacre justement la liberté d’expression, il ne compte que des amis parmi l’humanité afin de combattre ensemble leur seul ennemi commun : l’ignorance, en l’occurrence !

    Aussi précieux, sinon bien mieux que ces lingots d’or et autres prestigieuses parures dont disposent à satiété les très chouchoutées princesses des Grands Royaumes d’antan, il n’acceptera cependant jamais leur statut incommodant et très dévalorisant d’être tout le temps coffré, inutilement emprisonné, occasionnellement bradé ou même vulgairement échangé suite à un très bête coup de tête !

    Des sous tout comme de leurs obscurs et très sombres dessous, il s’en moque royalement ou s’en offusque machinalement ! Il s’en fiche de leur triche à tout le temps courir après ces rusées et très lucratives niches d’enrichissement qui font pousser des ailes à ces nouveaux Seigneurs de riches d’une planète à la philosophe devenue à la longue désuète.

    Seul témoin des grandes œuvres et autres choses importantes de la vie de ces très vieilles générations, il en conserve à travers le temps si minutieusement et très jalousement à la fois leurs précieuses archives et utiles documentations, telles ces solennelles déclarations d’où jaillissaient à coup de mots subtilement agencés la liberté des peuples autrefois longtemps opprimés.

    A chaque rendez-vous de son habituel SILA (Salon International du Livre d’Alger), il est là à attendre impatiemment ou de pied ferme que son lecteur lui caresse à nouveau les rebords de sa nouvelle tunique de couverture aux couleurs de la saison, enfilée avec grand soin pour l’occasion, l’invitant à y entrer sans frapper et en toute tranquillité !

    S’adressant aux riches comme aux pauvres de toute la planète, il leur tient un même langage et les traite de la même façon, n’accordant en revanche ses faveurs qu’à ceux dits privilégiés parmi l’humanité qui en font leur ami fidèle et confident de tous les temps.

    Dans sa version papier, forme très traditionnelle, ou encore dans celle dite moderne et très numérique, il ne fait pas de jaloux autour de lui : à la première catégorie de ses lecteurs  il refile cette odeur des rotatives qui lui colle au nez, et à la seconde il offre cette commodité à s’en servir à tout moment bien loin de son antre de bibliothèque.

    Il est le produit de ces mots sans lesquels la vie n’aurait aucun sens. Il est le résultat de tant de postulats que la mathématique admet dans sa thématique de raisonnement. Il contient tous ces secrets de l’humanité qui font avancer les peuples, se développer des nations.

    Continuer à l’ignorer, n’est autre que s’ignorer soi-même !  C’est plutôt s’égarer dans d’inutiles considérations. En tant que créateur de richesses inestimables et de grandes découvertes scientifiques dont profite l’humanité, il reste ce précieux support didactique qui fait vibrer les cœurs, cultiver les esprits, prospérer le progrès  et avancer les peuples.

    En bon ambassadeur des époques anciennes tout comme des temps modernes, il garde jalousement en son sein ces secrets inviolables qui défient le temps, les royaumes et les gouvernants.

    Quoiqu’on dise quoiqu’on fasse, il restera toujours ce témoin privilégié des temps anciens qui nous fera tout le temps face, arguments à l’appui !

    Et quelque en soit son prix, il n’est jamais évalué ou estimé à sa juste valeur ! Inculquer le Savoir est cette noble mission que tout l’or du monde ne saurait égaler.

    Lire la suite

  • Entre sanglots de Césarée et tristesse de Iol !


    Cherchell de ce début du troisième millénaire a beaucoup peur pour son histoire ! De sa propre histoire ! On y aura entre temps tout dépravé et tout détruit de cette mémoire collective qui fait remonter le temps et réactualiser les évènements.
    Entre sanglots de Césarée et tristesse de Iol !

    Le désastre y est grand ! La catastrophe énorme ! Les dégâts astronomiques… ! Il est bien dommage qu'une histoire pareille parte en ruines, déchirée en mille morceaux !

    Les quelques vestiges et sépultures, gisant tels des cadavres humains, seuls témoins vivants de cette grande tragédie, ne peuvent plus refaire l'histoire : l'oubli est trop important ! Les trous de mémoire auront donc tout détruit ! Ou tout emporté de cette mémoire qui refuse d'être inspectée !

    Le puzzle est trop compliqué dans sa configuration pour être recomposé. Il est plutôt question de cette autre mentalité qui se moque royalement de l'histoire du pays, parce que tout le temps instrumentalisée par un pouvoir aux aguets, refusant toujours de reconnaître cette vérité qui l'exclue de toute gloire et l'efface de toute mémoire.

    Un important pan de la société s'effrite : c'est sa mémoire collective qui est en danger ! Cherchell refuse ces bas-compromis et autres nombreuses combines faites à son sujet ! Elle tient à nous dicter sa propre histoire, décidant de se retourner vers ses aïeux et ses nombreux héros !

    Ainsi, Iol et Césarée y sont pour l'occasion invités à sa rescousse, accueillant qui son fils qui son petit-fils dans leur giron, le couvrant de bénédiction pour l'amener bien loin de ces regards complètement désintéressés de son nombreuse population par l'état de déliquescence avancé de ces lieux d'histoire où l'archéologie en témoin plutôt gênant et millénaire tient le haut du pavé.

    La ville, longtemps oubliée et à répétition piétinée, se recroqueville sur elle-même, se réfugiant dans son histoire la plus ancienne ! Plus grave encore, personne parmi sa nombreuse et bien éduquée population ne consent à l'en empêcher ! Ne se résout à aller la chercher au plus profond de ses tripes ! Au plus loin de son voyage fait à reculons jusqu'à décider de ressusciter sa gloire légendaire, ses héros immortels et son autorité, autrefois implacable sur toute la région !

    Le recul est donc réalisé dans le plus intime de ses rêves ! Dans le plus inaccessible de son éternel sommeil !

    Lorsqu'en 1984, en haut lieu de la hiérarchie du pouvoir algérien, on lia son sort à celui de Tipasa, les grands hommes de lettres et de bonne culture pensèrent un moment à cette union vitale entre cette utile histoire à conjuguer avec cette ancestrale culture –à bon escient espéraient-ils !- dans cet espace touristique qui allait lui servir de véritable tremplin au plan géographique et spirituel.

    Ils auront vite déchanté de voir les deux contrées vouées aux gémonies de l'enfer de cet oubli qui tue plus fort que l'arme de combat au milieu de ces cités-mouroir qui étonnent leur monde par leur salubrité et se bétonnent à tout va et contre le fait culturel.

    Depuis, Cherchell, dépitée par tant de malheur qui lui arrive par la manière osée de sa propre progéniture, est donc retournée se calfeutrer à l'intérieur de ses plus vieilles hardes et très anciennes guenilles. Et comme dans un rêve, un peu moins inconscient, elle y rencontra Iol et Césarée, le temps d'une très brève sieste, lors d'une tempête de l'inculture annoncée mais jamais dénoncée !

    Seulement son malheur dure dans le temps. Son calvaire perdure dans cette galère dont elle ne voit plus la fin !

    Résultat de l'équation proposée : il n'y fait plus bon vivre comme autrefois et jadis… !?

    On y ressent ou y découvre donc cette tristesse de Iol, ces sanglots de Césarée et cet abandon à jamais de l'actuel Cherchell… !

    La ville, encore frustrée de son histoire magnifique et très honorifique pour le pays et la région, refuse donc de voir du côté de la mer. A présent, elle tourne carrément le dos à la Méditerranée, méditant son sort et s'accrochant de toutes ses forces à ce col auquel elle est tout le temps bien collée et qui la protège de ces vents chauds venant du sud du pays.

    Juba, Jugurtha, l'Emir Abdelkader et bien d'autres héros et valeureux combattants pour l'indépendance du pays, se retourneront certainement dans leur tombe en prenant connaissance de son état lamentable de déliquescence du moment, difficilement admis au plan de la forme et surtout dans le fond pour une si belle perle de la Méditerranée d'antan.

    Leur combat si noble et très fécond suscitera-t-il un quelconque intérêt pour cette merveilleuse ville qui refuse de mourir, de périr et de sombrer dans cet anonymat culturel ambiant et bizarre du pays ?

    La contrée, bien vieillie et complètement dépouillée de ses nécessaires béquilles, ne peut plus relever la tête, se redresser sur pieds, se soulever très haut pour planer comme autrefois sur ce flanc de la Méditerranée.

    Elle attend toujours le diagnostic de son médecin privé, lequel semble incapable de trouver à son mal le remède approprié.

    Cherchell a surtout besoin de considération pour bien se réveiller. Pour revenir de nouveau à la vie ! Elle a vraiment hâte de renaître à la vie et couvrir de son charme discret le touriste éveillé pour lui faire découvrir sa grandeur, ses splendeurs, telle cette fleur printanière qui embaume de ses toniques odeurs l'atmosphère, ou cette resplendissante demoiselle qui étrenne sa beauté et ses rondeurs, dévoilant au passage ses formidables couleurs et répandant abondamment alentour ses enivrants parfums du terroir et de bonheur.

    Sommes-nous conscients de tout cela ?

    Ou alors lui a-t-on déjà préparé son cercueil au même titre que d'autres prestigieuses contrées du pays ?

    Cherchell a tout le temps été perçue telle cette très élégante demoiselle jouant sur ses deux barres parallèles, où l'histoire et le quotidien de la ville ne sont plus que deux lignes droites qui ne se rencontreront jamais ! D'où d'ailleurs l'abandon forcé de cette culture qui fait l'histoire des civilisations !

    La caricature est très expressive. Symbolique même ! Et à plus d'un titre. Elle nous empêche de regarder dans le rétroviseur ! De nous situer dans le temps ! De nous remettre tout le temps en cause ! De nous intéresser à la ville et à son histoire la plus ancienne… !

    Est-ce un nouvel état d'esprit ? Où est-ce encore l'effet néfaste de notre propre inculture ? L'absence de ce tourisme florissant des années soixante-dix du siècle dernier n'y est-elle pas pour quelque chose ?

    Tout concourt à conclure que notre très difficile quotidien nous met à une bonne distance de notre valeureuse histoire, très profonde et bien féconde.

    Ce choix douloureux, somme toute- aura peut-être été fait à dessein. Et seul l'avenir pourra y répondre, un jour…...

    Rédigé le 09/08/2011 à 05:42 dans Histoire, Tourisme | Lien permanent.

  • Entre le bar et le cimetière

    « Ici, c’est mieux qu’en face ! », annonçait discrètement le barman à ses nombreux clients presque tous apôtres  de Bacchus et de l’air de la musique qui accompagne leur festin.

    «Tous ceux qui reposent ici nous viennent d’en face !», lui répliquait le gardien du cimetière qui lui fait face, seul survivant et unique porte-parole de ce monde des morts, au repos forcé depuis leur venue en ces lieux calmes, tristes et bien sinistres. Ce dialogue à distance entre un monde terré dans un endroit de tout repos et un autre bien brouillant et très bruyant, lui faisant face, montre à quel niveau peut bien mener ces querelles de la vie qui n’épargnent ni les morts ni ces mots blessants pour ces êtres  humains se chamaillant tout le temps, dans la perspective de squatter qui un lieu, sinon vanter, qui un quelconque espace. Dans Alger de l’époque coloniale existait un quartier qui portait le nom de Saint-Eugène ayant, depuis l’indépendance de l’Algérie, été rebaptisé Bologhine Ibnou Ziri.

    La rue Abdelkader Ziari qui le traverse d’est en ouest met face à face le cimetière chrétien de la ville avec ce fameux stade de l’ASSE, truffée à l’époque de ses stars et renvoyant vers le cimetière, le dimanche venu, l’écho de tous ces chants bruyants qui réveillaient les morts d’à côté de leur sommeil du juste ou éternel. En bordure de ce stade existait alors cet estaminet vers lequel tous les matins cheminaient ces gens qui venaient shooter de la bière, puisque incapables de se mettre en short et de courir après un ballon à l’intérieur du périmètre de jeu, en tuf et bien poussiéreux dès que s’aventure sur les lieux le moindre vent de passage dans la région. Quelle que soit la saison de l’année, il fait toujours chaud et surtout bon vivre à l’intérieur de cette échoppe vendant bières, vins et spiritueux à ces habitués de Bacchus voulant échapper au climat oisif qui les contraint à trouver bonne place à l’intérieur de ces lieux de rêve où l’on marquait cette longue trêve par rapport à une vie lucide et bien souvent intrépide, ingurgitant à longueur de journée ces succulents liquides.

    Ainsi aura été faite la vie de ces nombreux fêtards qui veillaient bien souvent très tard, accoudés à ces tables garnies de ce vin qui coulait à flots, leur inspirant ces rêves fous ou improvisés qui pouvaient parfois les mener au cimetière d’en face en prenant le risque de traverser discrètement la grande avenue qui sépare les deux lieux. Le bar et le cimetière vivaient ainsi leurs jours de joie et heureux et ceux de tristesse et bien malheureux. Cependant, chacun portait un écriteau à sa porte d’entrée accroché bien haut. Sur celle du débit de boissons alcoolisées, il y est écrit le règlement intérieur de l’établissement et ses horaires d’ouverture. Tandis que sur celle du cimetière, il y est fait cette mention: « Ici, le riche et le pauvre se rencontrent, c’est Dieu qui a créé l’un et l’autre ». Puisée dans cette morale qui vaut bien plus que toutes les démocraties du monde réunies, la phrase, lourde de sens et de conséquences, a de quoi faire peur à tout son monde pour en revanche le remettre rapidement à la raison.

    Elle remet donc les pendules à l’heure pour cet individu, déjà complètement saoul, et remet au goût du jour ou de nouveau sur le tapis la valeur accordée à l’autre citoyen, aujourd’hui le corps enseveli sous le poids considérable de cette terre qui le couvre depuis sa mort. Et pourtant, d’un côté comme de l’autre des deux trottoirs ou rivages de la vie, il existe bel et bien ces règles scrupuleuses de la morale humaine à ne jamais dépasser. Bien que  l’homme fréquentant le bistrot arrive souvent à les enfreindre suite à cette consommation effrénée sinon exagérée de ce breuvage, lequel le conduit parfois à faire beaucoup de tapage, énormément de ratages,  bavardage inconséquent à l’appui ! Face à ces morts, les gens saouls font la houle, exultent et s’excitent de cette vie qui leur sourit ou nourrit ces ambitions que leur procurent cet espoir de vivre jusqu’à ostensiblement se moquer outre mesure de ces morts d’à côté calfeutrés dans leur silence et pelotonnés dans leur humilité.

    Les seuls signaux en guise de réplique qu’ils peuvent leur refiler est ce vent de tristesse parcourant les lieux, les invitant donc sous forme d’échos-réponses à leurs cris de joie, à faire partie, un jour, de ce monde déjà parti pour de bon, en quittant, de gré ou de force, à jamais ou à trépas, ce monde ici-bas.  En définitive, avec le temps et quelles que soient les générations, c’est le silence des morts qui aura le dernier mot sur ces jacqueries de soulards bien heureux à table et devant leurs derniers pots avant fermeture du bar qui aura à les expédier tout à l’heure de l’autre côté de la barrière. Et si le bar fait dans ce mode sélectif et très expéditif en n’invitant à son établissement, tous les jours que le bon Dieu fait, que les gens riches ou disposant du nécessaire sou ; le cimetière, lui, ne fait pas dans cette discrimination de race et d’espèce.  Son invitation est officielle, bien solennelle et s’adresse à tout le monde. Gens riches et pauvres misérables meubleront toujours, à tour de rôle ou en groupe son grand espace, magnifique jardin, tout espéré du Paradis ou terrible enfer.

    La plaque d’entrée renseigne parfaitement d’ailleurs sur ces indications d’usage et ces destinations éternelles. Les gens attablés à ce bar iront tout à l’heure prendre  place dans le lieu d’en face, s’y couchant pour le reste de leur existence. Ils n’auront plus droit à la bière. Ils hériteront de droit et par devoir envers l’humanité de ce seul tombeau qui les différenciera de leurs pairs. Alors pourquoi se hasarder à vanter un quelconque espace de vie, si on n’est même pas capable de pouvoir librement disposer de son temps, lequel tôt ou tard nous enverra vers le périmètre d’en face, échouant tels des colis postaux à l’intérieur de ces cimetières honorables tout à l’heure longuement dénigrés et bien critiqués ? Bien évidemment, la morale ne s’en trouve nullement atteinte ; ce ne sont —disent nos sages— que des gens saouls qui ont fauté. Et comme ils manquent fondamentalement de lucidité, l’erreur a de fortes chances d’être plus tard rattrapée ou dans le fond bien corrigée. Le verdict populaire tombera sur le bistrot tel un couperet !

    Comme on ne peut pas déplacer le cimetière, c’est donc l’estaminet qui a, un jour, complètement disparu ! Depuis, il n’y a certes plus de gens saouls ; mais le monde dans son ensemble a cessé de rêver. Le rêve est devenu donc carrément interdit pour les jeunes gens surtout !  Pour les fanatiques de l’ASSE et du bistrot, on ne leur propose en échange que cette mer à traverser, truffée de ses nombreux écueils et innombrables cercueils ! A vouloir tout le temps taquiner à partir de l’autre trottoir le cimetière d’en face, ne finit on pas par traverser cette seule voie qui y mène et y demander éternel refuge un beau jour ? Telle est donc la morale retenue par ces soulards et qui concerne malheureusement toute l’humanité.

  • Rocher de Sel », entre miel et fiel

    ________________________________

    Bien souvent le coup de hasard n’est que le produit d’un bonus de la providence ! L’apport de la chance à saisir y est vraiment grand. Même si l’impact de la pure coïncidence y est, lui,  prédominant. Il reste que l’un ne va pas sans l’autre.

    « Les paroles s’en vont, mais les écrits restent ». C’est, en fait, de l’écriteau « INFIRMERIE INDIGENE » furtivement déniché au Musée local de Djelfa que l’auteur –voulant sans doute lui trouver son prolongement dans l’histoire de la contrée- s’engagea dans sa splendide aventure qui le mènera à Ain-Maâbad (Djelfa), pour ensuite se diriger vers le « Rocher de sel ».

    Le titre « Rocher de sel » renvoie au bourg de naissance du premier romancier Maghrébin de la langue française*. Il s’agit d’un descendant de la famille Bencherif, portant autrefois le nom de Mohamed Bencherif (1879-1921), capitaine au sein de l’armée française mais surtout doyen des écrivains Algériens.

    Il relate un combat pour la vie pour un indigène qui fut le pur produit de la prestigieuse école de Saint Cyr. Mais aussi celui d’une plume d’une grande tente des hauts-plateaux et de la steppe Algérienne. Là où le souffle du vent siffle à pleins poumons et en toute liberté. Jusqu’à remuer dans les regs des terrains ocre et nus qui séparent le Tell du Sahara, la terre arable des plaines intérieures du sable fin du grand désert.

    A mi-chemin entre le récit et le roman, le réel et la fiction, la biographie du soldat et le portrait de l’écrivain, l’histoire d’un « valet du pouvoir » et celle d’une plume « plutôt bien indigène », ce Rocher de sel déterre tout un passé d’une famille et sa région afin de faire ressusciter des fins fonds de la steppe la légende du premier écrivain Nord Africain.

    Sonder à postériori le personnage central de son roman en vue de pouvoir en constituer une approche qui colle le mieux possible au portrait-type de ce fils de Bachagha, était pour l’auteur de cet ouvrage d’une rigueur telle que la phase documentaire ayant intervenu dans la conception de Rocher de sel paraissait des plus denses, des plus longues, et surtout bien fouillée et très argumentée.

    L’idée d’explorer une telle piste –au demeurant pratiquement méconnue même si l’aventure en fut des plus exaltantes- relève plutôt du souci du détail dont fut animé l’auteur du récit/roman, en sa qualité de natif de la région considérée, mais aussi de par son statut de chercheur versé dans le domaine culturel à temps perdu ou à ses heures de repos.

    Cet agronome de formation, retraité du secteur public, Ahmed Khireddine, dont le manuscrit de son ouvrage avait été au préalable préfacé, annoté et corrigé par Guy Dugas, professeur

    de littérature française et comparée de l’université Montpelier III, avance dans le liminaire de son titre que son « essai est un devoir de mémoire » envers celui qui fut victime comme de nombreux semblables de « l’oubli collectif », fut-il encore cette toute première plume Maghrébine d’expression française, celle venue au monde au cours de la seconde décennie du siècle dernier**.

    Déjà, la remarquable préface en situe d’abord et à tout hasard, à la fois, le très dense contenu truffé de son volet documentaire mais aussi la véritable complexité d’un tel ouvrage, destiné avant tout à recomposer le puzzle de l’arbre généalogique de la famille Bencherif, et surtout à l’effet de faire un sérieux éclairage au sujet d’une fine plume des grandes tentes steppiques de nos hauts-plateaux agro-pastoraux.

    Selon les termes mêmes de la préface, cet ouvrage « restitue l’oncle à son neveu » et les deux, ensemble, à l’Histoire de l’Algérie indépendante. Il s’agit –poursuit-elle- dans son logique enchainement d’un « travail modeste mais très profond » ; car fort documenté et très fouillé, supports administratifs et photos de famille à l’appui.

    Cependant, le préfacier tient à souligner le caractère assez singulier de « la trajectoire complexe de la destinée des grandes familles » qui durent « fréquenter la France au plus près sans forcément trahir leur patrie ancestrale » ; raison pour laquelle il titra son introduction par cette expression plutôt très originale et assez paradoxale : « Réconcilier le goumier et le Moudjahid ».

    Dans le cours normal de l’histoire du pays, le combat de la famille Bencherif est étudié et décortiqué sur pas moins de quatre générations astucieusement réunies dont notamment celle du grand-père, Khalifa de son état auprès de l’Emir Abdelkader, de son petit-fils Mohamed, écrivain et néanmoins officier au sein de l’armée française, et de son arrière-petit-fils Ahmed, devenu plus tard Moudjahid mais aussi ex grand commis de l’Etat Algérien, celui désormais libre, indépendant et souverain.

    Très souvent, un simple indice aide à remonter de fil en aiguille le long itinéraire de toute une vieille histoire. A l’épreuve du temps, la mémoire se fait manu militari convoquer pour appuyer des documents, confirmer des dires, interpréter des actes, désigner des noms et identifier des lieux, déchiffrer des symboles, traduire des signes ou donner un sens à des insinuations, expliquer des comportements restés ambigus, témoigner des faits avérés, élucider des situations complexes et faire parler des chiffres immuables, des archives très anciennes et des photographies souvent immortelles.

    C’est donc à l’épreuve de ce fastidieux projet et non moins fabuleux exercice de conscience, très ambigu et assez compliqué du reste à mettre en harmonie et en œuvre, que l’auteur Ahmed Khireddine s’est consacré, en s’engageant dans son extraordinaire entreprise ayant pout but de faire renaitre à la vie une aussi méconnue plume d’expression française que le temps a malencontreusement ignorée et minorée et très tôt enterrée ou manifestement jetée à l’oubli.

    Dans cet ouvrage, l’auteur, fils de ce pays de nomades, un des leurs, parmi ceux très intéressés à exhumer cette grande culture de la région, s’attaque de front à son Histoire ensevelie sous le poids de tant d’années ou perdue au sein de cet immense territoire du  « Monde des Grandes tentes ».

    Celui souvent tenté de changer à chaque fois de domicile et de faire dans cette obligatoire et permanente « transhumance », en quête de pâturages et de gains substantiels à engranger par ces tribus vivant essentiellement d’une économie agro-pastorale.

    Il eut cette ingénieuse idée de faire ressusciter l’auteur disparu –surtout à travers son œuvre pionnière restée plutôt inconnue au sein de sa famille et dans son propre jardin et pays- au prix d’une louable tentative qui aura eu le privilège de recouvrer à la steppe son produit du terroir et label littéraire.

    Articulé autour d’une douzaine de thèmes inégalement répartis en termes d’espace qui leur est consacré et un épilogue en guise de synthèse, ce titre est riche de près 280 pages dont quelques unes servant juste de support d’images de famille, réunies et illustrées pour les besoins de sa confection.

    Ecrit dans un style léger, plutôt fin, alerte, simple, vif et incisif, propre au véritable récit, cet ouvrage dont la trame a été brillamment imagée, incarne manifestement le métier du journalisme d’investigation confondu avec celui d’un vrai romancier.

    Ainsi, les quelques « fragments de la vie de son héros » restés encore  obscurs ou « assez confus », faute de documentation, auront été savamment comblés et astucieusement rassemblés grâce à cet esprit purement romanesque au sein duquel l’auteur du Rocher de Sel se découvre cette « noble vocation ».

    Pour une première, ce fut une véritable réussite ! Presque totale ! Tant ce travail mené d’arrache-pied en amont a beaucoup servi, grâce à sa richesse documentaire, à dénouer l’écheveau mais aussi à apporter un sérieux éclairage sur une généalogie ayant vécu au cœur d’un combat d’une aussi ancienne Nation qui s’est longtemps battue pour le recouvrement de son indépendance et territoire.

    Mohamed Bencherif, né à Djelfa en 1879, petit-fils du Khalifa des Ouled Naïl auprès de l’Emir Abdelkader, est plutôt peu connu dans le monde de la littérature. Bien qu’il fût l’auteur du tout premier roman Maghrébin de la langue française (‘’Ahmed Ben Mostapha, goumier’’), sa réputation ne se situe cependant pas au diapason de cette haute distinction que devrait normalement lui conférer l’encre prolifique de sa plume habile.

    Cet indigène privilégié, de « souche vraiment émancipée », dont la famille devait plus tard vivre dans la périphérie immédiate de la Grande Cour du pouvoir colonial, a toujours évolué avec une certaine aisance au sein de la société française, même s’il restera fidèle à la pratique de la religion de ses ancêtres, l’Islam en l’occurrence.

    Ce premier livre de Mohamed Bencherif fait l’éloge du goumier. Aussi, autant dans l’histoire racontée à son sujet par Ahmed Kheireddine dans l’ouvrage Rocher de Sel, autant dans celle se rapportant à son grand-père Si Cherif Ben Lahrèche, Khalifa des Ouled Naïl auprès de l’Emir Abdelkader que véhicule une mémoire collective loin d’être éteinte ou affectée par le temps, la mort de l’un comme de l’autre parait des plus mystérieuses et fort énigmatique. La fidélité du premier-nommé à la religion Musulmane tout comme celle de son aïeul à l’Emir Abdelkader peuvent-elles être –à elles seules- les véritables causes de leur disparition ?

    L’histoire de la mort suspecte du (tout premier) capitaine indigène de l’armée française comme celle du tout dernier Khalifa de celle de l’Emir Abdelkader (son grand-père) se recoupent et se ressemblent jusqu’à en jeter le doute sur la version officielle de leur interprétation.

    Et si le petit-fils est mort en combattant parmi les siens en 1921 cette redoutable épidémie du typhus qui s’est déclarée dans la région de Djelfa, le grand-père, lui, l’aura été semble-t-il au cours d’un guet-apens monté contre lui par les autorités militaires d’occupation.  

    Faut-il également souligner que le vrai virage de la famille des Bencherif se situe au moment où cet aïeul prit pour épouse une captive européenne convertie à l’Islam. Le brassage des cultures le poussera à plus tard offrir l’hospitalité à Eugène Fromentin, lequel parle abondamment de lui dans son ouvrage ‘’Un été dans le Sahara’’.

    Rocher de Sel à qui revient ce grand mérite  de recomposer la trame assez dense de l’itinéraire historique de la famille des Bencherif se propose d’interroger les épisodes ambigus de la vie du héros (Mohamed Bencherif) en interprétant sa mort comme du reste celle  de son grand-père, grâce à des singularités souvent contradictoires qu’il a su expurger des fins fonds d’une mémoire encore valide au sein de ce pays des grandes tentes.  

    Sa proximité avec l’autorité coloniale lui a permis de connaitre non seulement le gouverneur général Célestin Jonnart et ses nombreux subordonnés ou affidés mais aussi de grands hommes d’art et de lettres de l’époque, à l’instar d’Eugène Fromentin et Etienne Dinet et autres auteurs de renom. Il en résultera une assimilation presque contre-nature qui expliquera en partie la mort douteuse de ces deux indigènes hors du commun.

    Entre miel et fiel, Rocher de Sel est cette fenêtre sur l’histoire de la famille des Bencherif qui puise sa sève (ou réserve) bien loin de cette littérature d’investigation et de régénération du vécu ancien de la région. Il (l’auteur) aura su mettre au goût du jour une époque surannée qui aura manqué de peu d’étouffer une plume aussi célèbre que plutôt méconnue qu’a enfantée la localité de Ain Maabed.

    N’eut été la dédicace*** de choix faite par l’auteur de l’ouvrage en l’honneur de son Excellence, Monsieur l’ambassadeur de France à Alger, à l’occasion de la visite de cette haute personnalité diplomatique au lieu de résidence de Mohamed Bencherif, ce livre autrefois étalé à même le sol chez son garde-chiourme de bouquiniste de la capitale n’aurait probablement jamais effleuré ma sensibilité ou attiré mon attention à l’effet de m’imprégner de son contenu et de vous en livrer par conséquent, bien plus tard, mes impressions et commentaires à son sujet.

    ----------------------------------

    (*) – Mohamed Bencherif, premier romancier Maghrébin d’expression française, Saint-Cyrien, capitaine de l’armée française et Caïd de Ain-Maabed (1879-1921).

     

    (**) –  Il est l’auteur de :

    Aux villes saintes de l’Islam (Paris – Hachette – 1919

    Ahmed Ben Mostapha, goumier (Paris – Payot 1920).

     

    (***) – En date du 29 janvier 2011, Son Excellence, Monsieur Xavier Driancourt, était en visite à la résidence de Mohamed Bencherif à Ain Maabed (Djelfa), occasion au cours de laquelle Rocher de Sel de Ahmed Khireddine (Paris- L’Harmattan – 2006) lui fut dédicacé sur site par son auteur dont ci-contre une copie de la dédicace.

    Lire la suite